Contrôle des gendarmes au rond point Jeanne Rose avec un chien formé à détecter les stupéfiants, le 10 septembre dernier. Le chien marque devant la cargaison d’un utilitaire Ducato : dans les parois des jacuzzi, les gendarmes trouvent 158 sachets d’herbe de cannabis. Il y en a pour 168, 314 kilos. Leur chien s’appelle Nirvâna, qui dit mieux ?

Encore une audience de CI à 6 dossiers, ça fait du 15 h + 8 ou 9 heures, ou plus

Le temps qu’un laboratoire analyse des échantillons du produit (13 % de THC), on peut juger, ce lundi 14 septembre, un ressortissant polonais, âgé de 32 ans, qui attendait en détention provisoire depuis le 14 septembre. C’est le premier dossier, à l’audience de comparutions immédiates, audience dont le rôle est bien chargé : 6 dossiers. L’audience commence à 15h20. L’interprète et l’avocat ont vu le prévenu dans les geôles juste avant.

Une annonce : 1000 euros à gagner « facilement »

Il dit qu’il est mécanicien mais qu’il a vu, sur un site de petites annonces, une offre de travail alléchante. 1000 euros à gagner « facilement » en faisant le chauffeur. Il est allé, à ses frais, de Varsovie à Berlin, puis de Berlin à Marbella en Espagne. Sur place, un marocain l’attend sur un parking avec l’utilitaire qui est vide. Puis « on » chargera les jacuzzi. Il dit qu’il a attendu sur une plage, on lui avait dit de partir tard le soir. Le marocain lui avait passé un téléphone portable sur lequel il a reçu la consigne de faire une étape à Barcelone où « on » complétera le chargement.

« Il a dit aux gendarmes qu’ils étaient gentils avec lui pour mieux le faire parler »

Il devait ensuite aller livrer à Cologne, à Mannheim, puis en Pologne. Mais son périple a pris fin au rond point Jeanne Rose, sur la commune d’Ecuisses. Et, soutient le prévenu : « Je ne savais pas ce qui se trouvait dans les jaccuzi. » Le président en doute : « Monsieur, il y avait une odeur, dans le camion, ça se sentait. » L’instruction dure plus d’une heure. « Qui lui a demandé de ne rien dire ? » Le vice-procureur insiste. « Il a dit aux gendarmes qu’ils étaient gentils avec lui pour mieux le faire parler. »

Valeur estimée du chargement : 1M7 euros

Charles Prost n’en a pas terminé. « Connait-il la valeur de ce qu’il transportait ? À 10 euros le gramme, la valeur estimée est de 1 700 000 euros. » « Fffffff », réagit le prévenu en secouant la tête, comme pour dire « C’est dingue ! » L’instruction est longue, le président Madignier pose des questions sur tout ce qui est « bizarre » dans ce dossier.
Il en fait le résumé : 1. vous dites que vous ignoriez transporter des produits illégaux. 2. c’était un travail sans contrat, juste par contacts via internet et téléphone. 3. Vous avez commencé à trouver ça louche quand en Espagne, un marocain vous attend et non un polonais. 4. Vous pouviez revenir en Pologne sans faire ce travail.

Il pouvait revenir, et il ne l’a pas fait : il est cuit

Le temps passe et le tribunal voudrait bien que le prévenu fasse « des réponses courtes ». Son casier est vierge mais une condamnation en Pologne pour des violences, vit en concubinage depuis 15 ans, avec la fille de sa compagne qui a 17 ans aujourd’hui. Il est donc mécanicien dans un garage. Il dit gagner 2000 euros par mois, « ce qui est un assez bon salaire, en Pologne », sa compagne en gagne 700. Avec ça, pourquoi prendre autant de risques pour 1000 euros ?

16h45 - Réquisitions

« Quantité importante et d’un produit de qualité, estimé à 10 euros le gramme sur le marché clandestin. Neuf auditions et des déclarations parfois contradictoires voire mensongères. Il a été pris la main dans le sac. » Le procureur développe sa lecture du dossier, les conditions d’emploi sont « suspectes », « je ne vois pas comment on peut s’engager pour 1000 euros en faisant l’avance des frais.
La somme proposée devait être beaucoup plus importante ». Les jaccuzi étaient vidés de leurs tuyauteries et moteurs. En avril 21 un dossier similaire, avec un chauffeur polonais et des quantités un peu plus élevées. 211 kilos du produit étaient dissimulés dans des palettes de croquettes pour chien. Le tribunal avait prononcé une peine de 30 mois. « Ce type d’interception se multiplie en Saône et Loire. » Le procureur demande une peine de 3 ans de prison avec maintien en détention, confiscation des scellés, et une ITF (interdiction du territoire français) de 5 ans

17h05 - Plaidoirie de la défense

Maître Vermorel annonce le plan de son argumentation. 1. « Une garde à vue de 96 heures, dont les premières ont eu lieu sans avocat. Je vous demande, par principe, d’écarter les auditions sans avocat. » 2. L’avocat voulait faire citer les autorités consulaires du Maroc : si on supprimait les exploitations intensives de cannabis au Maroc, on n’aurait pas des dizaines de convois quotidiens comme celui-ci. 3.
C’est une mafia organisée, « on met un traceur à ce mulet naïf », « tout est super organisé », « il ne connaît pas les gens qu’il rencontre, ils ne parlent pas la même langue. « Le Maroc est un état-voyou », répète Claude Vermorel. « C’est le dindon de la farce, dit l’avocat pour le prévenu. Prenez en considération sa candeur, il était très surpris par la valeur du chargement. »

17h35 - Décision du tribunal

Le prévenu est déclaré coupable et condamné à une peine de 26 mois de prison, il est maintenu en détention, à sa sortie il sera sous le coup d’une interdiction du territoire français pendant 5 ans.

Florence Saint-Arroman

Notre article du 11 septembre :
C’était la dernière réquisition de Damien Savarzeix, procureur de la République de Chalon sur Saône, avant son départ pour Grasse. Damien Savarzeix qui, justement, dans l’entretien qu’il nous a accordé, avait évoqué la lutte contre les trafics de stupéfiants (lire notre article).
Vendredi après-midi, dans le cadre d’une opération d’une vaste opération menée sur la zone de défense Nord Est, les gendarmes avaient donc été mobilisés pour deux points de contrôles en Saône-et-Loire. L’un à Mâcon Sud et l’autre sur le parking du Pont Jeanne Rose, à Montchanin, au carrefour de la RCEA avec la RN 80, la RN70 et donc la RD680.
Sous le commandement du Lieutenant Kaddouri, c’est un important dispositif qui avait été déployé. Avec des militaires du PMO de Chalon sur Saône, de la BMO du Creusot, de la BMO de Paray le Monial, de la communauté de brigades de Montchanin et du Creusot, et de l’escadron mobile de Mâcon, avec l’appui de l’équipe cynophile de Dijon et le chien Nirvana.

Un flair remarquable

Un chien qui a justement atteint le Nirvana en faisant preuve d’un flair remarquable. Nirvana vient juste de trouver des joints dans la sacoche d’un jeune étudiant, circulant en direction de Chalon sur Saône, qu’un VUL, un véhicule utilitaire léger de 3,5 tonnes, immatriculé de Pologne et conduit par un routier polonais, est invité à se faire contrôler par les gendarmes en poste avancé du côté du rond point de Jeanne Rose où, au flair, et sélectionnant les véhicules et conducteurs à contrôler…
En tongs bleues, le routier polonais tente d’abord de montrer une forme de décontraction. Mais une forme seulement car son regard n’affiche pas vraiment de la sérénité. On le sent de plus en plus nerveux. Mais Nirvana, un chien de 4 ans, spécialisé dans la recherche de stupéfiants, qui venait d’avoir son boudin en récompense, pour les joints flairés de l’étudiant, lui ne se fie par aux regards, mais bien à son flair.
Nirvana qui se montre particulièrement excité en commençant à tourner autour du camion. Les gendarmes mènent alors de premières investigations dans la cabine, puis au milieu du chargement du VUL. Nirvana de toute évidence sent quelque chose. «Oui oui, il a repéré quelque chose», lâche la gendarme qui est son maître.

Le conteneur avait été enveloppé

Restait à découvrir quoi. Les militaires s’intéressèrent alors à un gros colis noir qui semble hermétique. Mais pas suffisamment. Quelques tours de tournevis et alors que le Colonel Vailler, adjoint au Commandement de Groupement vient d’arriver, ce sont deux gros sacs d’herbe de cannabis qui sont sortis du conteneur noir qui avait été enveloppé d’un film blanc en plastique.
Les gendarmes sont au nirvana et peuvent afficher une vraie satisfaction. Le routier fait grise mine. «Game over». Il tente bien de faire comprendre qu’il ne comprend pas, mais personne n’est dupe. Il est conduit à la brigade de gendarmerie de Montchanin pour être placé en garde-à-vue. Le camion est lui remorqué à la gendarmerie pour être expertisé et pour découvrir la totalité de la nature de son chargement. Il s'agit aussi pour les enquêteurs de savoir où les stupéfiants avaient été embarqués et où ils devaient être livrés.
Interrogé par creusot-infos vendredi soir, le parquet de Chalon sur Saône, se limite à déclarer que plusieurs dizaines de kilos de stupéfiants ont effectivement été découverts. Les compteurs s’affolent, au prix du marché de l’herbe de cannabis, on peut déjà estimer la valeur du chargement à plus de 500.000 euros à la revente. Le parquet ne dit mot. Il faudra attendre la fin de la garde-à-vue et sans aucun doute la présentation du routier polonais, pour en savoir plus.

Alain BOLLERY

(Photos Alain BOLLERY)

Une dizaine d’infractions relevées

Les deux opérations de contrôles menées vendredi après-midi en Saône-et-Loire auront donc été particulièrement fructueuse. Outre le jeune étudiant et surtout le routier polonais et son chargement, les militaires ont aussi procédé à d’autres verbalisations indique le Lieutenant Kaddouri. A savoir une récidive en matière de stupéfiants, un permis de conduire non prorogé, une conduite malgré un solde de points nul, un usage de téléphone et trois contrôles techniques manquant.

A.B.

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Les autres opérations de contrôle :