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14/05/2021 12:55
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Exposition : Les bonnes photos et les bonnes histoires de Jean-Paul Gollin avec François Mitterrand

40 photos pour les 40 ans de son élection. Jean-Paul Gollin, qui était le photographe préféré de François Mitterrand en Bourgogne, a plongé dans ses archives pour présenter une exposition remarquable à la galerie d’arts du Château de la Verrerie.
ACTUALISE : L'exposition est ouverte au public dès aujourd'hui vendredi.
L'exposition des 40 photographies de Jean-Paul Gollin est désormais ouverte au public les jeudi, vendredi et samedi de 14 heures à 19 heures. Et le week-end de Pentecôte elle sera à découvrir, aux mêmes horaires le jeudi, le vendredi, le samedi, le dimanche et le lundi de Pentecôte. Toujours en présence du photographe.


Notre premier article
Petit par la taille, grand par le talent… Jean-Paul Gollin n’a pas connu l’ère du numérique du temps de ses activités professionnelles. Lui c’était l’argentique. Les pellicules Ilford ou Kodak que l’on développait parfois dans des laboratoires de fortune, dans des bains de révélateur et de fixateur que l’on préparait. A l’époque il n’y a pas de récupération de ces préparations chimiques. A Mâcon les bains usés allaient dans la Saône. Au Creusot c’était dans le grand collecteur, jusqu’à la rigole se déversant dans l’étang Leduc.
Il n’y a jamais eu de plainte déposée par les poissons. Ni par les pêcheurs. Heureusement pour les patrons de presse ! C’est donc dans cette époque bénie par les photographes pour les incertitudes qu’elles pouvaient révéler quant à la qualité d’une photo, que Jean-Paul Gollin a réalisé des clichés hors pair de François Mitterrand en Saône-et-Loire, en Bourgogne et dans le Morvan.
Parce qu’il avait du culot, parce qu’il n’y avait pas d’accréditations pour la presse, parce que les services de sécurité n’étaient pas en permanence sur les dents. Mais aussi parce que le Président François Mitterrand n’aimait pas être oppressé, Jean-Paul Gollin a très vite échangé avec lui. Et une relation s’est nouée. Une relation faite de complicité.
Entre le photographe du Dauphiné Libéré, puis du Progrès, puis du JSL et François Mitterrand la relation a été surprenante.
Mais il est vrai que Jean-Paul Gollin savait faire. Après chaque reportage photographique sur une visite ou venue du Président de la République, et notamment après chaque escalade de la Roche de Solutré à Pentecôte, Jean-Paul Gollin passait des heures et des heures dans le laboratoire, avec l’agrandisseur, pour tirer des dizaines d’exemplaires de ses meilleures photographies. Et il les adressait à l’Elysée, à Jack Lang, à Roger Hanin et à toutes celles et ceux qui, disait-on, constituaient le cercle du Président.
Pour les 40 ans de l’élection du Président de la République, Jean-Paul Gollin, qui n’était pas à Château-Chinon le 10 mai 1981, a puisé dans ses archives. Il a sorti 40 photos. Toutes en Noir et Blanc. Toutes très symboliques du rapport affectueux que le Président Mitterrand avait avec la Saône-et-Loire, le Morvan et la Bourgogne.
Jean-Paul Gollin a accepté l’invitation de David Marti, maire du Creusot, à venir exposer le caviar de son travail de photographe passionné. Et c’est ce travail que François Hollande, Lionel Jospin, Bernard Cazeneuve, Pierre Joxe, Jean Auroux, Jean Glavany et d’autres anciens Premiers Ministres, dont André Billardon, découvriront avec aussi Anne Hidalgo, Johanna Rolland, Anne Lauvergeon, Camille Dufour… Jean-Paul Gollin leur racontera sans aucun doute les petites histories qui accompagnent quelques photos et dont il a donné la primeur à creusot-infos.

La 1ère rencontre

«La 1ère fois que j’ai rencontré François Mitterrand, tout juste élu Président de la République, c’est à la Pentecôte de 1981. J’étais alors photographe au Dauphiné Libéré à Bourg en Bresse. Mon directeur m’avait alors dit : «Solutré ce n’est pas loin de chez nous, vas faire un reportage» Et c’est au petit restaurant de Fernand Buccanieri, ancien champion de France de Boxe, que j’ai rencontré le Président. On devait être une dizaine de journalistes, guère plus. Il y avait Pierre Joxe et Claude Estier. Ils étaient en train de déguster un Pouilly Fuissé que Fernand leur avait offert. Le Président trinque avec nous et j’ose lui dire : «Monsieur le Président je voulais vous parler d’une chose». Il a eu un petit mouvement de recul, sans doute un peu surpris. Je lui ai dit que j’habitais un petit village, frappé par la crue de la Saône, qu’il ne connaissait peut être pas. Je lui ai dit que c’était Feillans. Et là il m’a estomaqué. Il connaissait précisément où se trouvait ma commune. Il m’a envoyé dans les cordes en me lançant «Je suis la situation des inondations et si elle empire, je viendrai sur place. Depuis ce jour là, il ne m’a jamais oublié…»


La dernière fois

«C’est en septembre 1995, quelques mois avant sa mort en janvier 1996, que j’ai vu François Mitterrand pour la dernière fois. Je savais qu’il était à Cluny. Mais cette fois ci ce ne sont pas les services de l’Elysée qui m’avaient discrètement informé, comme ils le faisaient si souvent… Moi je savais qu’il allait dans les librairies. Je suis allé à celle de Cluny et là on me dit qu’il venait de sortir. Et là je le vois à la terrasse d’un café avec Roger Hanin. Il m’a vu, m’a fait signe de venir et m’a invité à boire un café avec eux. On a parlé un peu de tout, de la météo. Il était déjà très fatigué».


France – Allemagne à Beaune

«Le Président Mitterrand avait décidé qu’un sommet France – Allemagne se tiendrait à Beaune. Avec 11 Ministres Français et 11 Ministres allemands. Il y avait beaucoup de presse, beaucoup de photographes. Avec le Chancelier Kohl, ils devaient aller de la Mairie à la Sous-Préfecture. Entre journalistes, on avait fait des groupes. Et là quand François Mitterrand me voit, il s’arrête, il m’appelle et il me dit «Ca me fait plaisir de vous voir. Vos conditions de travail sont difficiles». Je lui réponds que j’ai l’habitude. Il ajoute qu’il croit qu’il y a de bons photographes. Je lui réponds avec le sourire, je crois que moi aussi. Il me sourit un grand coup et il repart avec le Chancelier».


Le coup de Vergisson

«A chaque Pentecôte François Mitterrand montait jusqu’en haut de la Roche de Solutré, où il y avait toujours plus de journalistes et de photographes. Le 7 juin 1992, j’étais en haut de Solutré, à l'attendre, quand on est venu me dire à l’oreille qu’il fallait que j’aille très vite à la Roche de Vergisson. Quand je suis arrivé au pied de la roche, les forces de l’ordre m’ont interdit de passer. J’ai fait appeler François Mitterrand avec les radios, pour qu’on lui dise que j’étais en bas, qu’il fallait me laisser passer. L’autorisation est enfin arrivée. J’ai monté les deux kilomètres en courant et en haut j’étais le seul photographe. Cela l’avait beaucoup amusé. Il m’a fait remarquer la chance que j’avais. Je savais que c’était grâce à lui, mais il ne me l’a pas dit !» Et Jean-Paul Gollin a vendu beaucoup de photos ! A suivre…

Alain BOLLERY

L’ouverture au public de la galerie d’arts sera prochainement précisée sur creusot-infos