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> Faits Divers > En Saône-et-Loire
07/03/2024 14:15
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TRIBUNAL : Quand les insultes poussent un Policier à mettre des claques, celui-ci est condamné

Cette nuit-là, un équipage fonce à une supérette pour interpeller un homme, ivre, qui a agressé la caissière. Insultes et menaces fusent, jusque dans le véhicule. Or les policiers ne sont que deux... La vrai question de ce procès : Peut-on vraiment parler de violences ? En tout cas, ce Policier du Creusot présente des «Etats de service irréprochables», «lettres de félicitations», «il avait sauté dans le canal pour sauver quelqu’un»...
Une chose paraît acquise : la tension devait monter dans l’habitacle de la voiture, car le jeune adjoint de sécurité a enclenché sa caméra piéton. C’était le 22 juin 2022, au Creusot. Ce jeudi 7 mars 2024, un policier est à la barre du tribunal.
Il est jugé pour violences selon la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité. Assisté de son avocat, il vient de rencontrer le procureur de la République qui a examiné le dossier et lui a proposé une peine. Là, il fait face à la juge chargée d’homologuer (ou pas) la peine.
Au départ de la procédure : l’homme interpellé et frappé (trois claques et cheveux tirés) après son interpellation, a fait un signalement sur la plateforme de l’IGPN. S’ensuit une enquête. Les images de la caméra piéton activée par l’adjoint assis à l’arrière font foi. Le policier reconnaît donc.


De nuit, deux policiers, un mis en cause en état d’ivresse
A la barre, il est peu audible, mais évoque « l’intervention ». Maître Bibard en rapporte les circonstances.
Cette nuit-là, un équipage fonce à une supérette pour interpeller un homme, ivre, qui a agressé la caissière. Insultes et menaces fusent, jusque dans le véhicule. Or les policiers ne sont que deux (comme dans l’affaire récente à Montceau, d’une interpellation qui part direct en vinaigre : les policiers n’étaient que deux, ndla).
N’être que deux au lieu de trois, ça compte : l’un conduit (le policier qui comparaît aujourd’hui), le second est assis à l’arrière à côté du mis en cause. Du coup, pas de chef de bord à la place du passager avant.
Les insultes saturent l’habitacle, l’ADS enclenche sa caméra, le chauffeur se retourne et intervient, brutalement, sur un homme déjà menotté (personne n’a évoqué ce point à l’audience, mais il paraît clair qu’il est important), pour qu’il la ferme.

Dépositaires de l’autorité publique et la question de la violence
Nous n’aimons pas l’expression « violences policières » -qui pourtant est entrée dans le langage courant -, pour une raison grammaticale (il en va de même pour RSA, puisque l’accord « solidarité active » n’est plus valable vu que c’est au bénéficiaire de l’allocation d’être « actif », ndla).
« Violences policières », ça ne va pas, car les policiers sont, du fait de leur fonction, dépositaires de l’autorité publique. Ils sont armés, et peuvent recourir à la violence. Pour que celle-ci reste légitime, donc autorisée par la loi, elle doit être nécessaire et proportionnée.
Il faut donc plutôt parler dans les cas qui dépassent le cadre, de violences arbitraires et donc illégitimes exercées par un policer, qui en ce cas est en faute.

Verrouillage de la parole et effet de corps
Ce sont des affaires difficiles au sens où la population méconnaît (et veut méconnaître – elle préfère projeter, comme sur l’institution judiciaire du reste, ses fantasmes) les conditions de travail des policiers, méconnaissance totalement aggravée par le verrouillage de la parole dans l’institution policière, qui vient renforcer les suspicions, etc.
On pense ici à une affaire jugée* qui laisse un goût amer. Il est vrai que dans cette affaire, il y avait peu d’images (quelques photos prises par des riverains, de nuit, lors d’un contrôle). Or quasiment seules les scènes filmées donnent lieu, visiblement, à des poursuites et des condamnations.
L’effet de corps, chez les policiers, chez les magistrats, comme dans toutes les professions, est à la fois naturel et dangereux car il interdit à des regards extérieurs non seulement d’avoir une lecture, mais une lecture qui serait fondée. Soustraire aux regards, c’est créer des zones fermées, des huis-clos, on sait à quel point cela est mauvais et contraire aux principes de la vie démocratique (même si on sait que le règne de l’opinion est une plaie et la presse en fait aussi les frais, c’est dire).

Une saine attitude à l’audience
Mais ce policier-là, qui comparaît, seul, ce jeudi matin, ne se défile pas, n’est pas vindicatif, il est posé, il n’avait pas déposé plainte pour les outrages et menaces contre la victime « pour assumer son acte » dit son avocat. La présidente Croissandeau lui rappelle les bases : « C’est un peu votre métier. Vous êtes formé à ça. Des individus difficiles, vous avez à en gérer souvent », « vous avez un certain bagage, pour gérer une situation difficile ». La juge veut savoir si ces procédures-là imposent un suivi psychologique. Réponse : « Non. »
« Etats de service irréprochables », « lettres de félicitations », « il avait sauté dans le canal pour sauver quelqu’un »… maître Bibard fait tout pour justifier la demande, acceptée par le procureur, de l’absence d’inscription de la peine au B2 du prévenu qui en perdrait son travail et qui, de toute façon, va passer en commission de discipline pour ces mêmes faits, après l’audience pénale. Ce policier n’est plus un débutant.

« On a bien conscience que vous ne faites pas un métier facile, mais… »
La juge homologue donc la peine proposée par le parquet : une amende délictuelle de 3 000 euros, avec sursis.
« On va dire que c’est une erreur de parcours. On a bien conscience que vous ne faites pas un métier facile, mais vous vous devez d’être irréprochable. N’hésitez pas à faire vous-même des démarches pour être aidé, accompagné. » La victime absente, incarcérée. Maître Charbonnel, saisie en dernière minute, obtient un renvoi sur intérêts civils en juin prochain.

Ceci, et cela, et la question des images, aussi
Voilà, un signalement a débouché sur une condamnation.
A Montceau, un homme était sorti de garde à vue avec, entre autres, la mâchoire cassée (3 et 5 jours d’ITT pour deux policiers, 70 jours pour le prévenu), et pourtant sa plainte à l’encontre d’un seul policier fut classée après retour IGPN. L’homme en question a été condamné pour rébellion. Rien ne répondra jamais à cette question pourtant posée par les juges lors de la première comparution (lire ci-dessous) : qui l’a mis dans cet état ?
FSA

https://montceau-news.com/faits_divers/600399-mont...
https://montceau-news.com/faits_divers/658173-mont...
https://montceau-news.com/faits_divers/677215-trib...
https://montceau-news.com/faits_divers/680976-trib...

Pour ceux qui veulent quelques éléments pour nourrir une réflexion : https://www.cairn.info/revue-geneses-2009-2-page-...