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> Faits Divers > En Saône-et-Loire
01/04/2025 03:17
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TRIBUNAL : Quand il rentre à la maison, au Breuil, elle constate qu'il a bu... Elle se jette sur lui, le gifle et lui griffe sérieusement le visage

Le 21 novembre dernier, au Breuil, il y eut une dispute violente de trop, au domicile d’un couple vieux de 20 ans, qui avait fondé famille, mais dont la relation n’a visiblement pas su trouver ses marques dans le respect de chacun. A la barre ce 31 mars, madame et monsieur.
En cette fin novembre, la mère apprend que son fils (ou un de ses fils) a été victime d’un accident, loin du Breuil. Inquiète, elle cherche à joindre son mari. Il ne répond pas. Quand il rentre enfin à la maison, elle constate qu’il a bu. Elle se jette sur lui, le gifle et lui griffe sérieusement le visage. Voilà ce dont elle doit répondre, et à l’audience, elle dit enfin comprendre pourquoi elle est jugée également.
Elle a mis du temps à le comprendre parce que la réponse de son mari, ses réactions à l’assaut mené par madame qui devait lui en vouloir à mort de rester injoignable alors qu’un de leurs enfants était en difficulté, est ahurissante de violence.

Les versions des prévenus ne concordent pas
Monsieur reconnaît (pas immédiatement, du reste) avoir poussé sa femme au sol puis lui avoir mis son pied chaussé sur le visage, « pour l’empêcher de se relever ».
Madame, elle, dit qu’il l’a en réalité mise au sol deux fois. A l’audience elle s’empresse de préciser que « je veux que ça s’arrête, si pour ça il ne doit y avoir qu’une seule chute… »
Devant les minimisations de l’un comme de l’autre à la barre, la présidente doit préciser : « Ce n’est pas un fait isolé, c’était déjà arrivé. »
La procureur va mettre les pieds dans le plat et en marteler le fond avec vigueur, excédée par l’attitude du prévenu et les relativisations en cours à la barre, d’un côté comme de l’autre.

Un étranglement - « Il serrait si fort que je suis tombée dans les pommes »
La magistrate commence par lire un extrait des déclarations de madame devant les forces de l’ordre : « il m’a empoignée, mise par terre, a appuyé sa chaussure très fort, sur mon visage, il en est marqué » puis elle lui crie qu’elle va l’envoyer en prison pour ça, cela déclenche une seconde réplique. La femme décrit un étranglement. « Il serrait si fort que je suis tombée dans les pommes. » Elle perd connaissance, le sphincter de la vessie se relâche.
La procureur le dit crûment pour que les mots percutent l’homme mais il reste en retrait, barricadé. « J’ai eu tort. » Là, c’est lui qui déclenche une réplique. « Vous avez tort ? ça, on sait ! Mais on parle de votre femme, de la mère de vos enfants, pas d’autres réactions ?  - Si. – Ah ! On vous écoute. – J’aurais jamais dû le faire. »

Saisir sa femme par le cou, « c’est déjà arrivé »
Ce côté Captain Obvious en embuscade derrière ses barrières de défense conduit la procureur à aller sur le terrain du passé : des violences verbales, et aussi, saisir sa femme par le cou. « C’est déjà arrivé » concède le prévenu. Sauf que ce n’est pas un geste anodin, les magistrats sont attentifs à cela.
« C’était pour la repousser » précise-t-il. Alors ça, ça ne passe pas du tout. Saisir quelqu’un par le cou, ce n’est pas le repousser, c’est vouloir le contrôler, c’est un geste de domination en plus d’être une menace.

« Quand est-ce que vous allez respecter les attendus légaux ? »
Le passé, c’est aussi le passé pénal du prévenu : quelques condamnations dont la dernière fut une peine de sursis probatoire, or l’homme n’en a pas respecté tous les termes, pas davantage qu’il n’a respecté les conditions de son contrôle judiciaire. « Quand est-ce que vous allez respecter les attendus légaux ? »
Il balbutie : « Je vais m’en occuper, je vais prendre rendez-vous. »
Son avocat produit une pièce qui atteste d’un rendez-vous pris.

Les réquisitions - « réaction disproportionnée » de monsieur
Pour des faits caractérisés d’un côté comme de l’autre, les peines requises sont bien différentes.
« Madame n’a jamais contesté » mais il y a « un monde » entre son geste nerveux (et violent, bien sûr) et « la réaction disproportionnée » de monsieur.

« La réalité de la procédure »
La procureur rappelle « les termes de la loi » : « la violence est interdite, et particulièrement au sein de la famille » (ça constitue un facteur aggravant, ndla).  « Les violences étaient régulières, et on peut en venir à des extrémités très dangereuses.
 La scène de novembre fait peur. Elle a failli y passer, c’est ce qu’elle a ressenti et c’est la réalité de la procédure. »
Contrôle judiciaire : madame s’est conformée, monsieur, non.
En résumé : la dangerosité n’est pas la même et les violences non plus.

« Si… et si monsieur ne vient pas… alors je vais… »
La procureur demande, contre monsieur, une peine de 15 mois de prison dont 5 mois seraient assortis d’un sursis probatoire. Elle s’adresse au prévenu : « Et si le tribunal prononce un sursis probatoire et que monsieur ne vient pas (= ne répond pas aux convocations, ndla), moi je vais dégainer et prendre des réquisitions pour le faire incarcérer. » La peine serait de 10 mois de prison ferme « pour un étranglement et une victime qui a failli y rester ».

« Alors qu’elle est au sol, monsieur quitte les lieux en fermant la porte à clé »
Maître Bouflija plaide rapidement, car elle « souscrit aux réquisitions de madame le procureur de la République », non sans ajouter une cerise sur le gâteau : « Alors qu’elle est au sol, monsieur quitte les lieux en fermant la porte à clé. » Sa cliente a eu 6 jours d’ITT. Monsieur n’en a pas eu.

« Un contexte particulier »
Maître Duquennoy ne souscrit pas, lui, aux réquisitions. Si le tribunal doit condamner, bien sûr, il doit le faire dans des proportions plus modestes. L’avocat plaide le contexte de cette scène : deux parents tendus par le souci pour un de leurs enfants. « Un contexte particulier, donc. Et puis madame lui dit qu’elle va l’envoyer en prison, on voit que ça déborde. » Le prévenu travaille, en CDI. Pour l’alcool,
« vous avez des analyses, rassurantes, et il a pris rendez-vous chez un psychologue ».
Remarque qu’on n’a pas fini d’entendre, sur un problème déjà ancien : « On sait que c’est la croix et la bannière pour obtenir des rendez-vous. »  

« Je m’en veux d’être la source de… » dit la femme
Monsieur n’a rien à ajouter, madame, si : « Je trouve que c’est trop fort, la prison ferme (elle est très émue). Vous n’imaginez pas ce que ça serait pour nos enfants. Je m’en veux d’être la source de…, de…, je ne veux pas que nos enfants souffrent. Mes enfants sont beaucoup plus importants que moi. Je veux vraiment les préserver. »

Le tribunal (juge unique) dit les prévenus coupables
La femme est condamnée à 1 mois de prison avec sursis, et pourrait, cas échéant, prétendre à la pension de réversion.
L’homme est condamné à 1 an de prison dont 6 mois sont assortis d’un sursis probatoire pendant 2 ans, avec obligations de soins (psycho et addicto), de payer le droit fixe de procédure, de faire un stage de sensibilisation aux violences intrafamiliales, interdiction de paraître au domicile de madame ainsi que de tout contact. Le tribunal dit qu’il ne pourra, cas échéant, prétendre à la pension de réversion.

Les derniers mots sont importants
La présidente s’adresse à madame : « Monsieur est condamné pour ce qu’il a fait. Pour ses actes et parce que c’est sa 5e comparution et qu’il a déjà bénéficié d’un sursis probatoire complet. Il est condamné pour tout cela et non pour ce que vous avez dit. Cette peine, il en est l’auteur, pas vous. »
FSA



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