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> Faits Divers > En Saône-et-Loire
08/06/2023 03:16
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Torcy - Montcenis - Chalon sur Saône : «Cerval» condamné à 10 ans de prison et 100.000 euros d'amende, pour trafic de stupéfiants

7 ans de prison et 30 000 euros d’amende pour «Crapaud»
Le procès fut rondement mené. Le tribunal a rendu ses décisions concernant les 10 prévenus impliqués à des degrés divers dans deux trafics de stupéfiants, ce mercredi 7 juin en milieu d’après-midi.
C’est ainsi que Faozi Guilouchi, creusotin d’origine, jugé en état de récidive légale, a été condamné à la peine de 10 ans de prison, à 100 000 euros d’amende et à une interdiction de séjour en Saône-et-Loire pendant 5 ans assortie de l’interdiction de détenir et de porter une arme.
Nombre de prévenus l’ont désigné comme étant « Cerval », le boss.

Seconde peine importante : Boualem Belbachir, dit « Crapaud », est condamné à 7 ans de prison et à 30 000 euros d’amende. A sa sortie, il sera interdit de séjour en Saône-et-Loire pendant 5 ans. Idem pour l’interdiction de détenir/porter une arme.

ITF et mandats d’arrêts
Faouzi M. est condamné à la peine de 4 ans de prison. Il fait l’objet d’un mandat d’arrêt.
Mehdi K. est condamné lui aussi à 4 ans de prison - mandat d’arrêt également -, ainsi qu’à une interdiction du territoire français (ITF) de 10 ans.
Mickaël M., le gros revendeur, est condamné à la peine de 5 ans de prison dont 1 an est assorti d’un sursis probatoire pendant 2 ans, et à une interdiction du département de Saône-et-Loire pendant 5 ans.

Les réquisitions de mandats de dépôts ont fait des absents
Il manquait des prévenus à l’appel, d’où un mandat d’arrêt supplémentaire contre A. G qui doit exécuter 15 mois de prison (le jeune homme, lundi matin, vivait très mal d’avoir à être jugé ainsi. Le président lui a rappelé qu’il avait refusé l’homologation d’une peine proposée par un procureur en CRPC, le prévenu ne semblait pas avoir compris ce qui lui arrivait). V. B. en revanche était là, avec un sac contenant quelques effets : 12 mois + révocation de 6 mois d’un sursis antérieur + mandat de dépôt.

Le revendeur de Montcenis, J. P., creusotin lui aussi, est condamné à la peine de 15 mois de prison dont 6 mois sont assortis d’un sursis probatoire renforcé pendant 2 ans. Reste deux peines : pour R. S., peine mixte et O. Y. dont 10 mois avec sursis. Son casier était néant et sa participation au trafic de cannabis de Boualem Belbachir plutôt minime, selon les éléments de preuves que contient le dossier.

Le tribunal a suivi les réquisitions
Le tribunal a suivi, voire dépassé (en doublant le montant des amendes), les réquisitions. Angélique Depétris, vice-procureur a repris hier mardi 6 juin, le déroulé de l’enquête et tout ce qui tombait dans l’escarcelle de la procédure (à la suite de quoi 7 avocats ont plaidé).
Le président Morelière, avant de rendre les décisions, a précisé que pour chacun, les peines fixées sont le fruit de : la gravité des faits, l’implication dans les trafics, la nature des produits vendus, les antécédents judiciaires et le parcours personnel de chacun. « C’est un tel enjeu de sécurité publique, que l’argument qui invoque ‘l’argent facile’ n’est pas recevable. »

La première enquête a accouché d’une seconde
Il ressort des enquêtes que Faozi Guilouchi, bien qu’il ait soutenu n’être que la nourrice de Boualem Belbachir, était le chef du trafic principal de cannabis, d’héroïne et de cocaïne. « Crapaud » en était l’intermédiaire, puis il a développé son propre trafic de cannabis. Donc les investigations et les interpellations se sont faites en deux vagues.

Une de ses armes en main
Pour la petite histoire, la procureur le rappelait hier, lorsque les policiers sont entrés à son domicile chalonnais pour l’arrêter, Faozi Guilouchi se tenait dans son salon, arme au poing. La perquisition a collecté 422 grammes d’héroïne, 47 grammes de cocaïne, plus de 3 kg de cannabis, 14 téléphones et un pistolet. Chez des membres de sa famille, les forces de l’ordre ont trouvé 4 autres armes et, planquées en différents endroits, des liasses de billets pour une somme supérieure à 50 000 euros, outre des sommes placées sur des comptes, etc.

Représailles immédiates en prison
Le mis en cause est alors mis en examen et placé en détention provisoire où se trouvait déjà le jeune M.M qui s’est fait alors casser la g… . Boualem Belbachir-Crapaud est interpellé quasiment 1 an plus tard et désigne lui aussi « Cerval » comme étant le donneur d’ordre qui l’avait recruté pour assurer la gestion des points de vente, puis, suite à leur brouille, il avait mené seul un trafic de cannabis (d’où ses voyages fréquents à Lyon). Un troisième homme dira également que « Cerval » était le chef.
Ainsi, malgré la routine stups qui consiste à se rétracter sous l’effet de la peur, les éléments au dossier étaient suffisamment forts pour que le tribunal suive les réquisitions. As usual, les victimes collatérales de l’activité délinquante des adultes sont, outre les consommateurs : leurs enfants.
Florence Saint-Arroman



Lire notre premier article (5/06) :
Le premier ennemi des trafiquants, ce n’est pas la justice, c’est la balance. Cette affaire démarre, comme beaucoup d’autres, par une dénonciation anonyme, en décembre 2020 : un trafic de cannabis, d’héroïne et de cocaïne, aurait lieu au 8 rue Henri Dunant à Chalon-sur-Saône, animé par le jeune M.M (23 ans aujourd’hui, comparaît détenu). La police se déplace : « En moins d’une heure plusieurs transactions sont suspectées, avec des clients parfois déjà connus ».

Un point de vente à Montcenis
L’enquête démarre par une surveillance. Trois jours plus tard, le juge des libertés et de la détention autorise des écoutes téléphoniques ainsi qu’un dispositif de surveillance images et son, dans le hall de l’immeuble.
Ces premières interceptions révèlent l’existence d’un point de vente à Montcenis. Le gérant est J.P., 46 ans, un creusotin pur jus qui se drogue et qui chaque soir doit remettre la recette du jour.
Il est absent ce lundi 5 juin. Il est poursuivi pour acquisition, transport, détention, et complicité d’offre ou cession de cannabis et d’héroïne, et puis pour usage de stupéfiants.

Les chauffeurs, les hébergeurs, les clients, les vendeurs, les fournisseurs
Les enquêteurs croisent les identités de tous les usagers et suspects avec le fichier de signalisation des manquements au couvre-feu (eh oui !) : plusieurs de ces personnes ont été contrôlées rue Dunant et sont déjà connues et/ou ont été détenues.
Au fil du temps, les échanges autour de « blanche » et de « marron » s’accumulent, la police repère ceux qui servent de chauffeurs ou qui prêtent leurs domiciles, car les lieux changent.
A Montcenis, par exemple, un trou dans la caisse vaudra au point de vente d’être fermé et rapatrié à Chalon, rue Allende, puis ailleurs, puis ailleurs.

Des balances, des drogues, des armes, de l’argent
Pendant ce temps le jeune M.M boulotte de la carte SIM comme si c’était des Dragibus. Cela exige de nouvelles autorisations d’écoutes et une demande de géolocalisation en temps réel.
On perquisitionne chez dix personnes, on saisit des balances électroniques, des armes, de l’argent, à la suite de quoi la police procède à une première vague d’interpellations. Toutes les auditions convergent pour désigner M.M comme vendeur de drogues. 
Mi-juin, un juge d’instruction prend les rênes de l’enquête. Les premiers éléments collectés ont permis de soulever l’existence d’un autre trafic, de cannabis cette fois-ci : nouvelles interpellations, nouvelles mises en examen.

10 prévenus à ce procès, 3 autres déjà jugés
Ils sont dix prévenus, ce lundi 5 juin. Dix hommes âgés de 23 à 53 ans qui vont devoir répondre, à des degrés divers, de ces trafics de stupéfiants.
Trois comparaissent provisoirement, détenus, sept comparaissent libres, l’un d’eux est d’ailleurs absent. Trois autres hommes ont été jugés et condamnés selon la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité.

Qui était la tête de réseau ?
Le procès devrait durer toute la semaine. Son enjeu sera de déterminer, si toutefois le tribunal y parvient, qui était la tête de réseau : une compétition va se jouer entre deux des prévenus détenus.
Le jeune M.M. n’est pas en lice, mais F.G (36 ans, natif du Creusot) et B.B (34 ans, natif d’Oran, en Algérie) qui sont dans le box avec lui, si. C’est du reste à eux que le président Morelière, à la demande de la procureur, Angélique Depetris, doit intimer dès le début de la matinée, l’ordre de ne pas communiquer entre eux et de s’abstenir de faire des signes à d’autres. 
C’est chez F.G, ainsi que chez des membres de sa famille proche, que les saisies les plus importantes de drogue et d’argent liquide (quelques dizaines de milliers d’euros) ont eu lieu, sans compter plusieurs armes avec leurs munitions.

La routine des procès stups
Sorti de ça, c’est un procès stups : à l’instar des pochons de drogue, les mots sont pesés, ce qu’on a pu dire en garde à vue n’est plus d’actualité.
S’il y a pu avoir pour certains des déclarations spontanées, elles ne le sont plus. Les dés sont pipés, les bouches sont cousues, so ist es.
Le président interroge chaque prévenu (sachant que la pause déjeuner en a égaré deux, ils sont trois absents désormais), confronte chacun à ses déclarations dans le silence d’une salle vide ou quasi vide, et chacun de répondre en cherchant à vider les mots de leurs précisions.

« Une certaine personne »
Par exemple, à Montcenis, ça s’est passé comment ? « Oh, ça a duré une semaine maxi, par le biais d’une personne », c’est M. M qui parle.
« Tout le monde sait qu’au Creusot, à Montcenis, y a énormément de consommateurs », alors « un couple de consommateurs est venu me voir, pour proposer de vendre ».
Les produits venaient d’où ? « D’une certaine personne », « de personnes qui avaient des surnoms », « Cerval », « Nino », …

« Un client avait une dette envers vous, dit le président, mais devait aussi à Boubou, dit Crapaud. Monsieur B.B., c’est vous ? » L’homme dans le box se lève pour répondre : « Non, c’est pas moi. » Mais ‘Boubou’ et ‘Crapaud’, ce sont ses surnoms.

Un trafic de cannabis
Dans la rue « au bout du lac » de Chalon, les clients défilaient, pas mal de clients. Les échanges argent/drogue se faisaient dans l’escalier ou dans le hall. Par contre B.B., interpellé lors de la seconde vague d’arrestations, avait développé, lui, un trafic « de cannabis » dit-il. A la barre, O.Y, 32 ans, casier vierge. B.B et lui sont amis, ils ont fait de nombreux voyages à Lyon, ensemble.
« Chacun achetait pour lui, pour sa consommation personnelle », soutient O.Y. Il ne savait pas que B.B gérait un trafic ? « C’était à mon insu. En tous cas, je n’ai jamais vu de sacs, ou quoi que ce soit. Je n’aurais pas accepté. » Le président : « Pourquoi vous n’auriez pas accepté ? Vous avez des principes ? »
Florence Saint-Arroman