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> Faits Divers > Au Creusot
11/07/2023 03:18
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LE CREUSOT : Vouloir faire brûler l'étude d'un huisser, ce n'est pas vraiment recommandé...

Des bières, une méprise et une lourde peine...
Soit un entrepreneur qui s’est fait avoir par un client et qui demande à un huissier de justice de procéder au recouvrement d’une coquette somme. Le client porte l’affaire devant le juge de proximité du Creusot. L’entrepreneur ne comprend visiblement pas bien tout ce qui se passe, incrimine l’huissier de ne pas avoir fait correctement ce qu’il devait faire.
Il a tort, mais se persuade qu’il a raison. Il s’adresse à la chambre des huissiers pour avoir un arbitrage. Démarche correcte, pour quelqu’un qui est mécontent. Mais le 6 juillet, et alors qu’il est dans l’attente d’une réponse de la chambre des huissiers, il passe en voiture devant l’étude.


Trois bières plus tard
Il a bu « trois bières », dit-il. Il se gare - « sur une place réservée aux handicapés » précisera maître Leray qui intervient pour l’huissier, « c’est un détail, mais… » -  et entre dans la cour du bâtiment. Il déplace un container jusqu’au palier de la porte d’entrée de l’étude et met le feu à du papier. Le commissaire de justice (nouveau nom des huissiers*) est présent. Il a entendu du bruit, aperçu de la fumée, il sort et voit son client s’enfuir.

« Le choix du feu est d’une extrême lâcheté »
Cet homme, 57 ans, est jugé par visioconférence ce lundi 10 juillet, à l’audience des comparutions immédiates, pour une infraction de dégradation du bien d’autrui par un moyen dangereux que le tribunal requalifiera en « tentative de dégradation » parce que la poubelle n’a rien.

La poubelle n’a rien mais pour la victime c’est une autre affaire : son étude fut entièrement détruite par incendie en 2018, et « monsieur X (le prévenu) le sait ». « Le choix du feu est d’une extrême lâcheté et ce n’est pas un choix anodin : il l’a fait exprès, et puis il a pris la fuite » plaide Mathilde Leray.

« C’est le geste, monsieur, qui est inquiétant. »
« On est dans un contexte un peu particulier, le 6 juillet dernier, avec des émeutes un peu partout en France. Vous êtes en colère et vous n’avez pas d’autre idée que de mettre le feu à une poubelle ? C’est quoi, l’idée ? Quel message vous souhaitiez faire passer ? » a demandé la présidente Catala au prévenu qui se tient dans le grand écran. L’homme pleure.
« J’ai pas réfléchi. Je suis vraiment désolé. » La présidente reprend : « Le feu ne s’est pas propagé, mais c’est le geste, monsieur, qui est inquiétant. » Le prévenu craque. « Ça fait très longtemps que je ne communique plus avec personne. J’arrive pas à m’en sortir. Y a que le boulot qui m’intéresse. Si je vais en prison, je perds tout,
tout. »

« La corde sensible se heurte à la réalité : l’incendie, et le casier judiciaire »
Aline Saenz-Cobo, vice-procureur, rebondit sur « la lâcheté » qu’évoquait l’avocate de la victime : « Monsieur se présente comme le bon entrepreneur, et en effet il suscite l’empathie, mais la corde sensible se heurte à la réalité : l’incendie, et le casier judiciaire.
Monsieur réagit toujours par la colère et avec un mode de fonctionnement dangereux. » Le casier du prévenu comporte 14 mentions. La dernière condamnation est en lien avec ce client belge qui fait des difficultés pour payer : l’artisan y est allé de menaces de mort, d’appels téléphoniques malveillants, etc. Il a été jugé pour cela et son sursis probatoire démarré en juillet 2021 allait prendre fin dans 15 jours.

« Un geste irréfléchi »
La procureur insiste : la victime est, vu sa profession, auxiliaire de justice, comme un avocat, comme un policier. « Nous ne devons pas tolérer ce comportement vis-à-vis d’un huissier. La justice se doit de protéger ses auxiliaires. » Elle requiert la peine de 6 mois de prison dont 3 mois seraient assortis d’un sursis probatoire pendant 2 ans, et le maintien en détention pour la partie ferme.
Maître Plassard plaide « un geste irréfléchi » :
« Il est en voiture, alcoolisé, il passe devant l’étude, il a voulu faire peur à maître Z. » L’avocate voudrait que son client « puisse continuer à travailler ».
« Maître Z. n’a jamais voulu justifier de son envoi de sa demande de recouvrement, il a jamais voulu. – Le prévenu, sanglote fort – Je peux pas continuer comme ça, j’ai besoin de soins. »

3 mois ferme et deux ans sous main de justice
Le tribunal suit les réquisitions, sauf pour le maintien en détention : il aménage les trois mois fermes en détention à domicile sous surveillance électronique.
Un juge de l’application des peines en fixera les modalités très bientôt. Le sursis probatoire démarre immédiatement : obligations de suivre des soins, de travailler, d’indemniser la partie civile ; interdiction de tout contact avec maître Z, ainsi que de paraître à son étude.
FSA

* https://www.service-public.fr/particuliers/vosdro...