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> Faits Divers > Au Creusot
28/04/2022 18:30
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LE CREUSOT : La tête fracassée par un Autunois d'origine, pour avoir insulté sa soeur, «comme si c'était une pute...»

Il veut être jugé. «Qu’on en finisse, c’est bon !» 31 ans, né à Autun, domicilié au CCAS du Creusot, on ne voit de son visage que son front, car il porte un masque chirurgical. Un front livide, cadavérique. Dans la salle, la victime. Un homme qui a été roué de coups. 45 jours d’ITT.
Le 15 mars dernier, monsieur X va déposer plainte au commissariat du Creusot : l’avant-veille, Y. s’est introduit chez lui qui vit au rez-de-chaussée, par une porte fenêtre. L’intrus l’a roué de coups. Coups de poing, de pied, au visage et sur tout le corps. Monsieur X n’a pas cherché à se défendre, soufflé par la violence de l’agression. A l’issue de cette scène, il constate le vol de son téléphone, de son ordinateur, d’une enceinte.
Un médecin constate, lui, ecchymoses, œdèmes, et de multiples fractures, au visage et à l’épaule. Monsieur X a dû être opéré. Il travaille habituellement dans une structure protégée. Il vit sous un régime de protection civile, celui de la curatelle renforcée. Il est à l’audience de ce jeudi 28 avril mais il est en arrêt de travail jusqu’à fin mai. La police a interpellé le mis en cause, dès qu’elle a pu le trouver, soit le 27 avril.


Instruction sur des roulettes
La présidente Catala s’assure, question après question, que le prévenu reconnaît les faits, « oui ». A-t-il frappé encore alors que l’autre était à terre ? « Oui. » Et pourquoi ? « Parce qu’il insulte ma sœur comme si c’était une p... » Il l’avait déjà frappé le 12, pourquoi avoir recommencé le 13 ? « Il l’insultait toujours. » A-t-il bien volé téléphone, ordinateur et enceinte ? « Oui. » Qu’en a-t-il fait ? « Cassés. » Pourquoi ? « La haine. » Savait-il que monsieur X est une personne vulnérable ? « On m’avait dit un peu qu’il était fragile, sous tutelle et tout. »

«Il doit être écarté de la société»
Le prévenu est en état de récidive légale. Trois fois condamné déjà pour des violences, un vol, et des sursis révoqués. Vu la gravité des faits, vu la récidive, le représentant du ministère public affirme sa dangerosité, estime qu’il « doit être écarté de la société » (on songe que le prévenu semble l’être déjà pas mal, ndla), requiert 30 mois de prison dont 10 mois seraient assortis d’un sursis probatoire renforcé pendant 3 ans.

La victime et la protection de soi
Avant les réquisitions, la présidente avait appelé la victime à la barre. L’homme explique l’opération du visage, la prothèse qu’on lui a posée. Il dit que le prévenu lui a entre-temps passé un autre téléphone et qu’il a pu récupérer l’enceinte.
Pour l’ordi, le prévenu assure mettre de côté pour réparer le préjudice. Ces deux-là se sont revus depuis les faits. La présidente veut savoir dans quel contexte, etc. « Ça s’est bien passé. Il a de la hargne envers moi mais ça a été. » Sur les faits :
« Je comprends ce que ça fait de se faire tabouler. » Il dit n’avoir jamais insulté la sœur du prévenu et dit avoir peur de lui, vu ses réactions. Veut-il une interdiction de contact ? « Ben... euh... On fait tous des erreurs... Qu’il se soigne, c’est tout. » La présidente insiste un peu, car elle lui demande s’il voudrait une mesure de protection, pour lui. Réponse : « J’en ai déjà une, j’ai l’UDAF. »

Le prévenu et le Tercian
Célibataire, sans enfants, sans domicile « depuis longtemps », dit-il. Son histoire n’est pas inscrite dans le temps, ou très mal. Il ne situe rien, il dit « ça date », « y a longtemps ».
Revenus ? L’allocation pour adulte handicapé. Pourquoi ? « Oh pour plein de raisons, madame. J’ai été violé quand j’étais gamin, tapé par mon père, violé par mon oncle, plein de trucs. » A-t-il déjà travaillé ? « Oui, un peu en CAT. » Quand ? « Ça fait un moment, madame. »
Il prend (sauf lors des faits, si l’on a bien compris) habituellement du Tercian. Alors, le Tercian, c’est rien moins qu’un neuroleptique*. Depuis combien de temps ? « Ça fait longtemps, madame. » Est-ce qu’on lui a diagnostiqué une maladie psychiatrique ?
« Peut-être. Je ne sais plus. » Pourquoi on lui prescrit du Tercian ? « J’en prenais avant, je continue à en demander (et son médecin traitant à le lui prescrire, ndla), ça me fait du bien, ça me calme. »

Toutes les questions que posent un tel parcours
Les faits sont donc reconnus. Pour sa défense, maître Duquennoy s’arrête sur cette histoire, qu’un homme vit dehors, boulotte un neuroleptique sans savoir pourquoi, parle de crimes contre lui enfant, perçoit l’AAH, « et qu’est-ce qui justifie cette décision ? On n’a pas ces éléments. »
L’avocat dit que le prévenu va purger 6 mois de sursis qui ont été révoqués, et que le quantum requis est bien lourd, non que les faits ne soient pas graves, mais surtout parce que toutes les questions que posent un tel parcours et un tel présent chez un homme né en 1991 n’ont aucune réponse et que pourtant, des réponses, il en faudrait, pour juger mieux.
Mais le principe de la comparution immédiate, c’est de juger et de « donner une réponse pénale », comme on dit, dans l’urgence. Point. « Qu’il se soigne, oui. Mais de quoi ? » répète Jérôme Duquennoy.

20 mois ferme puis un suivi renforcé
Le tribunal déclare le prévenu coupable et le condamne à la peine de 30 mois de prison dont 10 mois sont assortis d’un sursis renforcé pendant 2 ans. Obligations de soins en addicto et psychologiques. Interdiction de tout contact avec la victime et de paraître chez lui, obligation de l’indemniser.
Il devra intégrer le dispositif AIR (accompagnement individuel renforcé). Le tribunal décerne mandat de dépôt. Il sera incarcéré 20 mois plus les 6 mois révoqués avant l’audience. 26 mois de prison.
Florence Saint-Arroman

Maître Faure-Revillet assistait la victime, elle a demandé une expertise et un renvoi sur intérêt civil. Le tribunal ordonne une expertise et renvoie sur intérêt civil à l’automne.

* https://www.quechoisir.org/actualite-neuroleptique...
« Une « banalisation préoccupante », un « problème de santé publique ». (…) Chez les adultes également, ces médicaments sont abusivement prescrits pour des troubles anxieux, des troubles de l’humeur. Ils sont également administrés sans raison chez des personnes atteintes de démences. »