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21/09/2022 03:15
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LE CREUSOT : «C’est triste à dire, mais j’ai récupéré la lucidité quand j’ai vu que j’avais fait une grosse connerie. Alors, j’ai attendu la police, et puis voilà...»

Il a 34 ans, il est né au Creusot, y vit toujours. Sur un réseau social il avait rencontré une femme de son âge et voilà qu’ils se sont mis ensemble...
...en gardant chacun un chez-soi, et heureusement, les suites du jugement de ce lundi 19 septembre seront plus faciles sans doute à gérer.
Cette affaire a vu le jour dans la rue, un matin de juin. Une femme qui passait par là a vu la victime marcher, suivie et harcelée par son copain, trop insistant. Il avait bu et boulotté des Xanax. La témoin appelle la police, il est placé en dégrisement. Sauf qu’en sortant du commissariat, il a une idée fixe : sa copine a gardé les clés de chez lui, il veut les récupérer.
Il se pointe à son domicile et défonce la porte. La défonce littéralement : il n’y a plus de porte, tout est fichu, il manque même un panneau en bois. Sa copine n’avait pas les clés… Cette fois-ci, la police embarque le gars, et le parquet engage des poursuites.
 
Ils avaient enfreint l’interdiction de contact imposée à monsieur
La copine est une personne fragilisée par une maladie psychiatrique, certes stabilisée par un traitement adapté mais enfin elle ne travaille pas, et elle est placée sous curatelle renforcée. Maître Lamain la représente à l’audience et dit que cette femme a peur de monsieur désormais. L’avocate reste mesurée car le rapport du contrôleur judiciaire rapporte que les deux ont repris des échanges, en dépit de l’interdiction de contact. Les magistrats éprouvent le prévenu sur ce point : est-il conscient qu’il risque l’incarcération, à violer ainsi un cadre posé par un juge ?
 
Le mal-être et les souffrances de deux adultes qui sont à la peine
En réalité tout le monde reste mesuré dans ses propos, car si monsieur doit répondre de violences verbales, il est patent que madame n’était pas en reste et il est clair pour tout le monde qu’au final ces deux-là se font du mal et doivent tout simplement arrêter de se voir. 
Ce dossier raconte essentiellement le mal-être et les souffrances de deux adultes qui sont à la peine, dans tous les sens du terme. La présidente Barbut en vient à donner des conseils de bon sens au prévenu : qu’il s’occupe de lui, qu’il parvienne à aller mieux.
 
« J’ai écouté monsieur, je pense qu’il est assez honnête »
Et comme à chaque fois qu’une audience se déroule en bonne intelligence, tout le monde est d’accord. « J’ai écouté monsieur, je pense qu’il est assez honnête » déroule Cyrielle Girard-Berthet, substitut du procureur, qui dit que les violences habituelles sont caractérisées mais n’oublie pas que madame fut blessante également (sur des choses intimes que le prévenu lui avait confiées). Elle requiert la peine de 10 mois de prison entièrement assortis d’un sursis probatoire pendant 2 ans.
 
« Le discours d’un garçon un peu paumé »
« Madame le procureur a eu une juste évaluation des deux personnalités » reconnaît Maître Seriot dont la plaidoirie, sobre et sensible, brosse le tableau de ces deux histoires, douloureuses, dont la jonction n’a que des effets délétères. L’avocat introduit un bémol sur les violences morales : aucune insulte ni menace dans les messages envoyés par téléphone.
Il cite le policier qui a tout lu : « L’ensemble de la conversation révèle un couple amoureux, malgré des différends latents. »
« Au final, j’entends le discours d’un garçon un peu paumé, plaide Jean-Luc Seriot, qui a toutefois un ancrage stable puisqu’il travaille en CDI depuis 9 ans. »
 
Le prévenu a la parole en dernier
« Si vous me faites confiance, je ne la trahirai pas. Mais je voudrais dire ceci : je veux bien entendre que madame est traumatisée, mais elle était en bas de chez moi chaque semaine. Il faudrait que les gens qui s’en occupent lui disent qu’il ne faut pas. »
 
Deux ans sous main de justice
Le tribunal dit cet homme coupable et le condamne à la peine de 10 mois de prison entièrement assortis d’un sursis probatoire pendant 2 ans, avec obligations de travailler, de suivre des soins en addictologie et en psychologie, de réparer les dommages (matériels et moraux), et l’interdiction de tout contact ainsi que de paraître au domicile de la victime. Le tribunal ordonne l’exécution provisoire : tout prend effet à cette minute.
 
L’interdiction de contact
Il est presque 20 heures, la présidente retient l’homme encore une minute, elle insiste sur l’importance de respecter l’interdiction de contact : « Le juge de l’application des peines est particulièrement vigilant en matière de respect de cette interdiction. » Le prévenu lui répond : « Vous avez ma parole. » C’est dit !
Florence Saint-Arroman