Jérôme Durain, Cécile Untermaier, Clémentaine Autain... Tout le monde plaide l'union de la gauche ou des gauches. Mais de toute évidence, c'est plus facile à dire qu'à faire, surtout quand chacun veut jouer sa partition. Clémentine Autain, comme Jérôme Durain, ont souligné la menace du RN qui plane...
A Frangy en Bresse, il y a ce qui se dit à la tribune et ce que l’on entend avant et après les discours. Ainsi, Cécile Untermaier, battue aux dernières législatives, ne se fait pas prier pour dire tout le mal qu’elle pense de Jean-Luc Mélenchon, estimant que la ligne LFI, qui tient le Nouveau Front Populaire d’une main de fer, a ouvert la porte à la nomination de Michel Barnier à Matignon. De loin, de très loin, elle aurait préféré qu’un Gouvernement soit formé autour de Bernard Cazeneuve qui a été au rang de ses invités à Frangy en Bresse.
Cette année, elle a invité Clémentine Autain, qui s’est opposée à l’hypothèse de Cazeneuve à Matignon. Mais comme Clémentine Autain a pris ses distances avec Mélenchon, cela la rend plus fréquentable. Ce qui a donc permis, samedi après-midi, de rassembler une partie de la gauche socialiste, en présence de la verte Claire Mallard, tout sourire et qui a veillé à ne pas se piquer les doigts quand elle s’est retrouvée «rose à la main», sur la tribune, pour la photo finish…
Clémentine Autain, plutôt que de tenir la rose qu’on lui avait tendue, e préféré la poser sur le pupitre, pour applaudir… Il n’y a rien de malicieux à le souligner, mais l’observation mérite quand même d’être soulignée.
Car en politique, il y a les mots et les noms, mais il y a aussi les gestes. Pas forcément ceux du langage des signes. Certains mots et noms sont plus employés certaines années. Ainsi, PS et «socialiste» n’ont pas été beaucoup cités, ce samedi. Mais plus que le nom de Mélenchon pas cité une seule à la tribune, même si au détour de quelques formules, beaucoup ont cru l’entendre.
N'allez cependant pas affirmer que les politiques sont des cachotiers. Mais quand même, comme on sait qu’il n’y a jamais rien de gratuit, on se dit qu’encore heureux qu’il y avait le nom des «Amis de la Rose» sur l’affiche officielle, et que les roses rouges ont été distribuées à la fin, car on en finirait par se demander ce qu’est devenu l’esprit de Frangy si longtemps incarné par Arnaud Montebourg, qui est passé faire un tour samedi, mais sans en faire des tonnes.
Ces constations effectuées, à côté de cela il y a donc eu les discours officiels, introduits par Guilaume Badet, tout heureux de voir que ce samedi il y avait plus de monde que l’année dernière pour Raphaël Glucksmann.
«C’est vrai, mais franchement le discours de Glucksmann c’était quand même autre chose que celui de Clémentine Autain qui a enfoncé beaucoup de portes sur le thème de l’union. Un discours que j’ai tellement déjà entendu ici, même si elle y a mis sa patte personnelle», a taclé un militant, avant de retourner à sa voiture.
Alain BOLLERY
Jérôme Durain
«Frangy ce n’est jamais fini. Vous êtes toujours présents. Pour que la Rose résiste.
Ce sont des squatteurs qui s’installent au Gouvernement.
Deux questions se posent. Notre premier problème politique c’est que Monsieur Macron ne respecte pas les résultats. Il a organisé des élections et réorganisé les résultats.
Le Macronisme c’est un trumpisme aimable. Le second problème c’est le «en même temps».
On a l’union des droites avec le macronisme de droite, la droite et l’extrême droite.
En 2017, dans notre région, elle avait zéro député. En 2022 c’était cinq. Maintenant elle détient 13 circonscriptions dans notre région.
Ici en Bresse la droite a pactisé avec le RN. Julien Odoul vient d’appeler Gilles Platret pour nous débarquer.
Nous, nous avons besoin de l’union des gauches. Il y a la place dans le pays pour une gauche. Frangy c’est la terre de Pierre Joxe qui a été un des meilleurs ministres de l’Intérieur.
On nous explique que la gauche est nulle sur la question de sécurité. Alain Bauer a évoqué une gauche Janus qui serait dans le déni au niveau national. C’est caricatural.
Sur les narcotrafics, les élus de gauche ne restent pas les bras croisés, avec de la prévention, mais aussi une dimension répressive. Il faut être dans l’écoute de la société.
Ce qui se passe dans les narcotrafics, ça commence en Colombie et ça se termine à Dubaï. Nos élus ne sont pas responsables.
Dire que la sécurité est importante, cela ne veut pas dire que la Police ne doit pas changer.
On a besoin de sécurité, de tranquillité publique. On ne doit pas rester dans l’incantation.
Il faut des moyens. La gauche elle a des idées.
Bruno Retailleau a proposé des mesures toujours sanctionnées par le conseil constitutionnel, notamment sur l’immigration.
La gauche parlementaire est là et restera là pour changer le pays. On aura besoin de votre soutien et de votre énergie. Vive la gauche capable et responsable».
Cécile Untermaier
«Comment on créer le marasme… Pour gouverner, il faut perdre les législatives. On a un premier Ministre d’un parti ultra minoritaire, soutenu par un parti battu et adoubé par l’extrême droite.
Décider seul d’une dissolution, si possible après une défaite. Attendre plusieurs mois pour nommer le Premier Ministre. Attendre plusieurs mois pour attendre le casting des perdants/Attendre la fête de Frangy.
Il faut appliquer la maxime évangéliste : Les derniers seront les premiers.
La situation est grave, on ne comprend plus la France.
A Frangy, tout le monde a sa place, dès lors que la préoccupation c’est d’améliorer la vie des gens, jusqu’à l’écologie. Car le monde de demain sera écologique ou ne sera pas.
Clémentine je la connais bien. J’ai toujours apprécié sa façon de s’exprimer, loin de la fureur et du bruit, qui n’exclut pas la fermeté. Elle a réussi des choses intéressantes. Le vote d’une résolution à l’unanimité sur l’endométriose.
Clémentine ne peut pas être réduite au féminisme. Car c’est une matrice qui permet de pénétrer tous les sujets.
Le Rassemblement National est dans nos campagnes et la gauche est plus à l’aise dans les villes. Il faut en avoir conscience !»
Clémentine Autain
«Je n’ai pas hésité à venir. Cécile Untermaier a été impactée par une vague. Pour lutter, il faut l’union, il faut qu’on se parle, qu’on s’écoute. Il y a des camarades, insoumis, écologistes, socialistes. La coalition est arrivée première.
Aujourd’hui ici on peut parler, alors qu’on est dans un immense zaping. Développer une idée, c’est important pour notre intelligence commune.
Au 2ème tour des législatives, on a eu un sursaut qui est un sursis.
Le Président nous a mis dans un délire total. Macron a perdu mais il a dit on va faire comme avant. La droite n’a pas gouverné depuis 12 ans et elle est là. C’est grotesque.
On a besoin de se préparer à gouverner ce pays. Il faut réconcilier les deux gauches.
Nous avons été capables de nous mettre d’accord sur des dizaines de propositions.
Il faut se battre contre la Macronnie, contre l’extrême droite en embuscade.
Je resterai une défenseure acharnée de l’union et la culture de l’union. Il ne faut pas mettre en avant ce qui insupporte l’autre. Il faut donc supporter les autres. Chacun doit grandir en respectant l’autre.
L’Union ne doit pas être un Yalta des circonscriptions.
Je pense que bientôt on va être confronté à des élections. Il faut donc se conforter pour ne pas exploser. L’union ce n’est pas suffisant pour reconquérir l’électorat que nous avons perdu.
Il faut que l’on réfléchisse à ce qu’est notre récit commun. La retraite, les services publics, la hausse des salaires. Une majorité de Français sont d’accord et pourtant on est loin d’une majorité.
La question du programme est importante, mais elle est insuffisante.
La question c’est le récit, celui de la France que l’on veut pour demain.
La problématique a été posée par François Ruffin. Je viens de Seine Saint-Denis qui a mobilisés sur des discours, mais dans les campagnes ça ne marche pas.
L’enjeu, c’est comment on trouve un discours qui permette de fédérer.
Pour moi il faut l’esprit public. On voit bien que les services publics ont été fermés. Poste, transports, écoles, on se bat partout.
L’esprit public, il faut d’abord regarder ce qui ne marche pas. C’est le commun qu’il faut soigner, pour déterminer les politiques publiques. Sans quoi les individus ne pourront pas gagner. On a besoin des apports de la société.
Trouver sa place dans le collectif, qui doit être alimenté par la solidarité des gens qui le composent.
Le libéralisme tue les individus parce qu’il tue le collectif.
Dégager des profits, c’est comprimer les salaires et encourager à consommer toujours plus. C’est terrifiant. C’est une marche sans fin.
Face à cela, on a le bien commun avec des services publics pour faire reculer la marchandisation.
Le sens de l’Etat est étranger au Président de la République.
On a mis en place la saturation, dans les hôpitaux, les transports, les écoles. Avec un phénomène de déshumanisation, avec la dématérialisation.
Il y a un phénomène de saturation qui touche les agents. La gauche ne s’adresse pas assez à eux.
Marin » Le Pen a fait des scores délirants chez les profs, chez les hospitaliers.
Les agents sont victimes d’un discours que la gauche n’a pas combattu. De la politique du chiffre, des comptes à rendre, des chiffres à donner, à faire remonter. On aboutit à ce que les agents se fassent cracher de plus.
On arrive à des situations de saturation. Il faut pouvoir en sortir. C’est une question de moyens, mais aussi d’état d’esprit. Comme la multiplication des intermédiaires.
L’inégalité dans les territoires a augmenté. C’est comme cela que l’on a fermé les gares. On a un pays gangréné. Très vite on dit «on ne sait pas faire». Et on donne au privé et à l’arrivée ça coûte plus cher.
Il ne faut pas tomber dans le «c’était mieux avant». Mais proposer d’autres manières.
Ce sont les gauches qui peuvent amener du mieux vivre.
Il faut arriver à emballer sur le terrain, avec un récit national qui nous tire tous».
Alain BOLLERY