L'agence de l'eau Rhône-Méditerranée-Corse fait le point en
Bourgogne-Franche-Comté et en Grand-Est : quelle surveillance, quels
résultats pour les rivières et les nappes souterraines ?
L’agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse publie son nouveau rapport sur l’état des eaux, fruit de l'analyse de plus de 6,5 millions de données annuelles collectées sur les rivières, les eaux souterraines et les lacs des bassins Rhône-Méditerranée et de Corse.
En Bourgogne-Franche-Comté et Grand Est, 26 % des rivières sont en bon état écologique et 83 % des nappes souterraines affichent un bon état chimique. Ces résultats, évalués grâce à une surveillance en constante progression, notamment sur les micropolluants, permettent d’informer l’ensemble des acteurs et citoyens et de guider les actions en faveur d'une meilleure gestion de l’eau, ressource vitale pour nos écosystèmes et nos territoires.
8 fois plus de paramètres mesurés depuis 30 ans
Des eaux en bon état, c’est-à-dire en qualité et en quantité suffisantes, sont essentielles au bon fonctionnement des milieux aquatiques, à la préservation de la biodiversité, et pour satisfaire durablement les usages humains.
Pour diagnostiquer l’état des eaux des rivières, lacs et nappes d’eau souterraines, l’agence de l’eau met en œuvre un important programme de surveillance environnementale avec la contribution de l’Office français de la biodiversité.
Ainsi, chaque année, 1400 paramètres chimiques et biologiques sont mesurés dans les eaux des bassins Rhône-Méditerranée et de Corse. C’est 8 fois plus qu’il y a 30 ans lorsque la surveillance a démarré. En Bourgogne-Franche-Comté et Grand Est, il existe 208 stations de mesure en rivière et 259 stations de mesure dans les eaux souterraines dans lesquelles sont prélevés les échantillons d’eau qui sont analysés par des laboratoires agréés.
Chaque année, ce travail d’analyse s’enrichit et s’affine. En 2024, ce sont 6,5 millions de données qui ont été recueillies et exploitées. Au global, l’agence de l’eau investit annuellement 10 millions d’euros pour coordonner et mettre en œuvre ce programme de surveillance avec ses partenaires.
L’ensemble des données recueillies dans le cadre de ce programme est mis à disposition du public, des acteurs de l’eau comme de la sphère scientifique pour orienter les actions en faveur du bon état.
Que mesure-t-on dans les eaux ?
Eaux superficielles
Qualité physicochimique : l’oxygène, la température de l’eau, la présence de nutriments et l’acidification.
Qualité biologique : la présence de macroinvertébrés, diatomées, macrophytes, phytoplancton, poissons… dont la grande sensibilité aux pollutions en font des puissants bio-indicateurs.
Etat chimique : présence de substances dangereuses.
Eaux souterraines
Etat chimique : présence de nitrates et des pesticides
Quantité d’eau : niveau des nappes par rapport à leur capacité de recharge
26% des rivières en bon état en Bourgogne-Franche-Comté et Grand Est
Aujourd’hui, en Bourgogne-Franche-Comté et Grand Est, 26 % des rivières seulement sont en bon état écologique. L’eau est le plus souvent de bonne à très bonne qualité dans le massif du Jura, la partie montagneuse du territoire, ce qui n’empêche pas les rivières karstiques de ce massif de faire l’objet de plans d’action spécifiques pour retrouver un meilleur fonctionnement biologique.
En revanche, la qualité des rivières est quasi systématiquement altérée par la présence de pesticides dans les zones de plaine, notamment la plaine de la Saône. Sur ce même secteur du Doubs aval, la qualité des rivières est également impactée par le changement climatique qui élève la température de l’eau, nuisant ainsi à la vie aquatique.
Concernant les eaux souterraines, 83 % des eaux sont en bon état. Elles restent vulnérables notamment pour celles qui sont de nature karstique. Par exemple, les pesticides dégradent les plateaux calcaires de Haute-Saône et les alluvions de la confluence Saône-Doubs.
Globalement, la qualité des eaux s’améliore sur bon nombre de paramètres et les progrès sont visibles sur les dernières décennies. La quantité de pollution organique dans les rivières a en moyenne été divisée par 20 pour l’ammonium depuis 1990. Ces résultats sont à mettre à l’actif d’une politique volontariste d’amélioration des systèmes d’assainissement des eaux domestiques, fortement soutenue par l’agence de l’eau et les services de l’État.
Cette amélioration de la qualité physicochimique profite à la biodiversité, dont la preuve est la présence stable des invertébrés, des diatomées et des poissons même si elle peut fluctuer en fonction des conditions hydro climatiques comme en 2023 où la sécheresse sévère a impacté la vie aquatique.
Quant à certains micropolluants organiques, leur impact toxique dans l’environnement a été divisé par 4 entre 2008 et 2023 sous l’effet de la mise en place de normes de rejets, de politiques contractuelles avec les acteurs économiques (contrats de branche) en faveur de la baisse des émissions de ces substances mais aussi de l'amélioration continue de leur traitement par les stations d'épuration.
Mais les défis restent énormes pour enrayer les pollutions de toutes origines, que ce soit par les pesticides ou des pollutions émergentes comme les PFAS que l’on détecte mieux grâce à l’amélioration des techniques analytiques.
Les micropolluants sous surveillance
La surveillance environnementale mise en place au niveau des bassins Rhône-Méditerranée et de Corse a permis d’identifier un très grand nombre de micropolluants dans les rivières et les eaux souterraines. L’acquisition de longues chroniques, grâce à la pérennité des suivis, permet d’alerter la puissance publique sur la présence de substances dont l’impact sur notre santé et l’environnement mérite d’être évalué. Pour ces substances, qui ne disposent pour la majorité d’entre elles d’aucune norme de qualité environnementale, l’amélioration progressive des connaissances de leur comportement dans l’environnement et de leur toxicité permettra la définition de normes et la mise en place des mesures nécessaires pour protéger la population et notre environnement.
En 2023, sur les 1 400 paramètres analysés dans les eaux des bassins Rhône-Méditerranée et de Corse, 706 produits de synthèse ont été détectés au moins une fois dans les cours d’eau (356 dans les eaux souterraines), dont la moitié sont des pesticides. Dans la grande majorité des cas, les rivières ne sont pas plus polluées qu’avant mais l’amélioration de la capacité de détection fait apparaître des nouveaux polluants qui ne sont donc pas intégrés à l’évaluation de l’état des eaux, faute de normes environnementales.
Depuis 2015, l’agence de l’eau suit 159 polluants « d’intérêt émergent » dans le milieu. Il s’agit de substances pharmaceutiques, de stéroïdes, d’hormones, de stimulants, de cosmétiques. Parmi ces substances, plus de 130 sont présentes dans les cours d’eau des bassins Rhône-Méditerranée et de Corse, rejetées principalement dans les excréta (urine, fèces) des humains et des animaux domestiques et dont le traitement dans les stations d’épuration n’est souvent que partiellement efficace.
En Bourgogne-Franche-Comté et Grand Est, certains cours d’eau cumulent un grand nombre de substances, par exemple le Salon à Chalindrey (52), l’Ouche à Crimolois et à Echenon (21) ainsi que la Vouge à Aubigny-en-Plaine (21) ou la Thalie à Saint-Rémy (71).
Concernant spécifiquement la famille des substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS), largement utilisés dans l’industrie pour des produits de consommation courante, le bassin Rhône-Méditerranée compte 4 des 5 sites de production français, dans le Rhône, le Jura et le Gard.
En 2023, ces substances ont été détectées au moins une fois dans 71 % des stations en rivière et 50 % des stations en eaux souterraines. Peu biodégradables, ces substances parfois surnommées « polluants éternels » se situent à l’aval de certaines villes où leur présence dans l’eau peut avoir diverses origines : rejets industriels, rejets urbains, utilisation de mousses anti-incendie à proximité des aéroports, etc. C’est le cas notamment de l’Ouche à l’aval de Dijon (21).
L’impact de l’ensemble de ces pollutions sur les milieux aquatiques est d’autant plus fort sur les rivières dont le cours naturel est perturbé par des aménagements ou des prélèvements excessifs.
Souvent cumulées, ces altérations rendent les rivières plus sensibles aux effets du changement climatique : augmentation des températures de l’eau, baisse des débits estivaux qui réduit la dilution des polluants…. Cela se traduit concrètement par des espèces aquatiques fragilisées et dans les cas les plus graves, par leur disparition. Ces altérations peuvent également compromettre l’alimentation en eau potable, à partir des cours d’eau ou des nappes souterraines, ainsi que les activités économiques et récréatives qui dépendent de ces milieux.
Vous trouverez sur ce lien le rapport Etat des Eaux :
https://www.eaurmc.fr/upload/docs/application/pdf... et sur ce lien des visuels :
https://www.eaurmc.fr/upload/docs/application/pdf...
Des solutions pour agir
Reconquérir le bon état des eaux suppose de restaurer durablement l’ensemble des paramètres physico-chimiques et biologiques qui caractérisent un milieu aquatique en bonne santé. Cela nécessite d’agir sur l’ensemble des causes de dégradations en mobilisant tous les acteurs du territoire. Cette gestion intégrée des milieux aquatiques doit être pensée et mise en œuvre à l’échelle d’un bassin-versant ou de l’aire d’alimentation d’une nappe souterraine, dans le cadre d’une solidarité amont-aval, pour couvrir l’ensemble des enjeux.
C’est pourquoi l’agence de l’eau soutient les actions nécessaires à la restauration du bon état, l’élaboration et la mise en œuvre de plans d’actions et de contrats pluriannuels, multithématiques et concertés, associant plusieurs partenaires, pour atteindre le bon état des eaux.
Par exemple, sur la Nappe de Dijon Sud, soumise à des pollutions de toutes origines, mais également déficitaire en eau sur les bassins versants de l’Ouche, de la Vouge et de la Tille, les actions engagées dans le cadre des deux contrats de nappe, associées à une évolution de la réglementation, ont permis d’améliorer la qualité des eaux. Les résultats sont positifs sur la source de Cent Fonts, exutoire naturel de la nappe superficielle.
Autre exemple récent sur le ruisseau de Bénusse, affluent en rive droite du Doubs dont la qualité s’améliore grâce aux efforts de chacun comme la restauration du cours d’eau, l’optimisation de la station d’épuration de Dannemarie-sur-Crêtes et de son réseau d’assainissement et la limitation des rejets des professionnels de la zone d’activité. Les travaux sont encadrés par un suivi poussé de la qualité et de la quantité de l’eau, des sols, de la faune (poissons et insectes) et de la flore.
Des données accessibles à tous
L’agence de l’eau met à disposition du public toutes les données acquises dans le cadre de la surveillance.
Eaux superficielles
https://www.naiades.eaufrance.fr/
Eaux souterraines
https://ades.eaufrance.fr/
Bilan interactif de la qualité des eaux des bassins Rhône-Méditerranée et Corse
https://rhone-mediterranee.eaufrance.fr/bilan-annu...
L’application « Qualité rivière » permet de s’informer sur la qualité écologique des cours d’eau, sur les espèces de poissons qui s’y trouvent et sur la qualité des eaux de sites de baignade autorisés.
Communiqué