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16/07/2021 03:16
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Elevage bovin et charolais : 5 députés européens, dont Arnaud Danjean et Jérémy Decerle, veulent faire tomber le mur de l’Atlantique et imposer les «mesures miroir»

Ce n’est pas gagné, mais il n’est pas interdit de rêver. A l’initiative d’Interbev, de la Fondation Nicolas Hulot et de l’Institut Veblen, cinq députés européens sont passés par Ecuisses. Dans le cadre des accords internationaux de libre échange, ils veulent une application rapide et concrète de mesures miroir, aux importations européennes de produits agricoles.
Il faut le dire tout net. Entre les éleveurs de bovins français et ceux du Canada, d’Amérique du Sud, qu’ils soient du Brésil ou d’Argentine, il existe un océan. Celui de l’Atlantique évidemment. Mais surtout un océan entre les contraintes imposées aux uns, ceux de France, et l’absence de contraintes pour ceux des deux Amériques.
Et ce n’est pas forcément demain que les éleveurs français vont voir la vie en rose. Car quand on ose demander si en France et en Europe il ne faudrait pas appuyer sur pause concernant les nouvelles contraintes et les nouvelles normes, Benoît Biteau se dresse sur ses ergots.

Député Vert au parlement européen, paysan, comme José Bové, moustache comme le pacha du Larzac, mais un peu plus fournies avec le regard vif, Benoît Biteau non seulement considère qu’il ne faut pas appuyer sur pause, mais qu’il convient d’aller encore plus loin, car c’est de l’avenir de l’humanité et de notre planète qu’il s’agit : «C’est un défi pour les générations futures !»
Par une météo automnale Benoît Biteau était jeudi à Ecuisses avec quatre autres députés européens : Anne Sandre et Arnaud Danjean pour le groupe du Parti Populaire Européen ; Et Marie-Pierre Vedrenne et Jérémy Decerle, pour le groupe Renew. Elles et ils étaient donc sur les hauteurs d’Ecuisses, sur l’exploitation de Guillaume Perrot, éleveur de charolaises, rue des Marguerites. Vous savez cette petite fleur, avec laquelle on s’amuse à dire je t’aime, un peu, beaucoup, à la folie, pas du tout…
Entre les éleveurs français et ceux qui se trouvent de l’autre côté de l’Atlantique, pas besoin de chercher, c’est «je t’aime… pas du tout !»

Les mesures miroir c'est un peu comme la pluie

Avec plusieurs éleveurs pour témoins, dont Christian Decerle, président de la Chambre Régionale d’Agriculture, les cinq Députés européens, comme dans une messe, ont communié ensemble sur les bienfaits des mesures miroir.
Il faut reconnaître que l’emballage du paquet est joli autant que son contenu. Demander à un éleveur français s’il veut que ceux du Brésil, d’Argentine ou du Canada, soient soumis aux mêmes contraintes, c’est un peu comme leur demander s’ils préfèrent la pluie à la sécheresse, même si en ce mois de juillet 2021 ils trouvent qu’il en tombe un peu trop.
Car forcément quand on produit de la viande de qualité, sans hormone, que l’on ne donne pas à manger n’importe quoi à ses bovins, entendez pas n’importe quelle farine animale, et qu’on leur donne même des tourteaux de lin quand on est estampillé «AOC Bœuf de Charolles», forcément on a de quoi ruminer fort et même rugir de colère quand on voit ce qui se passer de l’autre côté de l’Atlantique.
Tout le monde est donc d’accord pour faire tomber le mur de l’Atlantique. On pourrait écrire aussi et pourquoi pas «ériger», mais comme on sait bien que les importations bovines ne vont pas s’arrêter, on préfère le qualificatif de «tomber». Pour faire tomber les protections et vides sanitaires dont bénéficient les éleveurs d’Amérique du Nord, comme d’Amérique du Sud.

En finir avec la concurrence déloyale, déjà au nom de la santé

C’est donc ce que l’on appelle les mesures miroir, qualificatif un brin techno, pour dire que l’on veut que les mêmes règles régissent l’élevage de chaque côté de l’Atlantique. En décodé, que les éleveurs français ne souffrent plus d’une concurrence déloyale, avec de la viande à bas coût dans les hypermarchés, pas forcément bonne à manger du point de vue de la santé, mais qui régale autant les distributeurs pour les marges dégagées, que certains consommateurs qui se contrefichent de l’origine de leur steak.
Ca fait bien trente ou quarante ans que les mêmes chose se répètent, que les mêmes dénonciations sont formulées. Alors faut-il espérer des jours meilleurs ? Oui. Oui vous avez bien lu Oui. Oui il n’est pas interdit de rêver.

Arnaud Danjean veut y croire

Et pourquoi donc ? Parce que tous les députés français au parlement européen sont d’accord. «Je veux y croire», lâche le Bressan Arnaud Danjean. Il veut y croire car, dit-il, «Rendre obligatoire nos règles ce n’est pas impossible. Les lignes bougent sur ce qui concerne la santé. Même si se pose aussi la question des contrôles et qui les fait…».
Arnaud Danjean, pragmatique, prévient : «On ne pèse que 10% au Parlement, ça veut dire qu’il faut convaincre au moins 40% des autres députés, pour avoir une majorité». Il relève deux bonnes mesures miroir avancées : «La traçabilité des processus d’élevage et d’abattage ? Et les normes environnementales qui commencent à s’imposer partout dans le monde
Quand on apprécie la qualité gustative de la viande charolaise, dont Christian Decerle aime à répéter qu’elle fait plus le bonheur des enfants qu’un pseudo steak de légumes avec des graisses et autres additifs, imposés dans les cantines au nom d’une vertitude qui n’est pas majoritairement approuvée par les parents, on se dit que ça devrait peut être pouvoir être possible.
«Le problème c’est que pour un paquet de pays, les accords commerciaux sont plus importants que la qualité de la viande», relève encore Arnaud Danjean. «Déjà en Allemagne et en Europe du Nord».

Jérémy Decerle : «Défendre une agriculture plus saine et plus contrôlée»

Benoit Piton se réjouit de la ligne partagée : «C’est un sujet trans partisan». Mais surtout comme les autres parlementaires, il attend beaucoup de la Présidence française. Et de lancer : «Nous devons réfléchir tous ensemble à l’évolution des règles dans le cadre de l’OMC».
Jérémy Decerle ne dit pas autre chose : «On est là pour défendre une agriculture plus saine et plus contrôlée. Si l’Europe veut être cohérente, alors elle doit l’être dans ses règles. On ne peut pas signer d’une main de «green deal» et signer de l’autre main le «Mercosur»
Mais parce que manger meilleur commence à devenir un dénominateur commun aux populations qui réfléchissent un peu et qui placent la santé comme un totem, sans doute que oui il faut espérer à l’avènement des mesures miroir. C’est tout le sens du rassemblement qui a eu lieu jeudi matin dans le haut d’Ecuisses. Et beaucoup d’éleveurs vous le diront : C’est bien dans le haut des cuisses que l’on trouve le meilleur de la viande charolaise !
Alain BOLLERY
(Photos Alain BOLLERY)