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07/05/2022 03:17
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David Marti, maire du Creusot : «Je n’écarte pas l’idée de quitter le Parti Socialiste»

EXCLUSIF : Dans une interview à creusot-infos, le Maire du Creusot et Président de la Communauté Urbaine, dénonce «les reniements et renoncements d’Olivier Faure» à la direction du Parti Socialiste qu’il pourrait quitter dans les prochaines semaines. «Jamais le parti socialiste n’avait pacté avec un parti populiste», dit David Marti. «Je ne ferai pas campagne pour La France Insoumise», affirme-t-il, avec force.
L’œil sombre, David Marti, maire du Creusot et Président de la Communauté Urbaine Le Creusot – Montceau, a voulu attendre de voir ce que la direction du Parti Socialiste allait faire, pour prendre la parole. Dans une longue interview, il réagit à l’accord qu’Olivier Faure et la direction du PS ont passé avec La France Insoumise. Il le fait avec des mots très durs.


Il y a un an, c’était le 9 Mai 2021, vous aviez réuni la famille socialiste au Creusot, pour le 40ème anniversaire de l’élection de François Mitterrand. Vous aviez imaginé un tel scénario pour la Présidentielle ?
DAVID MARTI : «C’est vrai que réunir la famille socialiste, au Creusot, avait un sens. Pour donner une impulsion ; il y avait, dans le rassemblement au Creusot, un acte essentiel. J’étais loin d’imaginer qu’un an après, on en serait là. Je ne pouvais pas l’imaginer. Pas à ce point là ! Non je ne pouvais pas imaginer que le PS soit dans le reniement et le renoncement les plus absolus…»


Olivier Faure n’était pas venu le 9 Mai 2021…
«Un an après, je me dis que ce n’est pas plus mal, compte tenu du reniement et du renoncement qu’il a portés».

«En 5 ans, sous la direction d'Olivier Faure, rien n'a été fait»

Quand il avait été porté à la direction du PS, vous aviez souhaité que la reconstruction du parti vienne des territoires. Vous n’avez pas été entendu ?
«Le boulot n’a pas été fait. Chacun sait que je me suis opposé à la direction actuelle du parti pour cette raison. Au cours du dernier congrès, j’ai porté une autre voix. Notre sensibilité a été minoritaire. En 5 ans, sous la direction d’Olivier Faure, rien n’a été fait. C’est lui qui porte la responsabilité de l’état actuel du PS. La direction a tourné la tête, au lieu de lever la tête ! Analyser était la condition nécessaire, pour remettre les citoyens au cœur de l’action politique. Le travail n’a pas été fait. C’est un échec collectif».

Anne Hidalgo, que vous avez soutenue, était-elle la bonne candidate ?
«Forcément la personne qui incarne le projet compte énormément. Une élection présidentielle, c’est toujours une histoire. Anne Hidalgo a malheureusement pâti de son image de Maire de Paris. Ce devait être un atout. Maire d’une des plus grands villes dans le monde. Avec une expérience y compris internationale. Elle avait des atouts. Elle a pâti d’une image exacerbée. Elle a subi un acharnement médiatique, par une presse bien pensante parisienne, qui lui en voulait.
Avec une autre personne, le résultat aurait varié, mais le PS n’aurait pas été qualifié. Pour une Présidentielle, il y a la personne et la confiance vis-à-vis du parti. La direction n’a pas fait le travail nécessaire.

Comment appréciez-vous l’accord avec La France Insoumise ?
«Je ne suis pas surpris. Le travail de destruction de Mélenchon vis-à-vis des socialistes a commencé. Il l’a engagé en méprisant le PS sur les territoires, là où on pèse énormément. Comme il avait, d’ailleurs, déjà méprisé les communistes en 2017…»

«Le PS va être laminé par Mélenchon»

Pourtant les communistes sont retournés avec lui…
«Oui, mais ce n’est pas mon sujet. Moi ce qui m’importe c’est le PS. Et le PS va être laminé par Mélenchon. Croire que l’on va exister avec un accord ça ne marche pas. Le nombre de circonscriptions accordées au PS, soixantge-dix, n’est pas acceptable. Surtout quand on voit le nombre de candidats LFI et des autres partenaires. C’est plus que du mépris. On est dans la situation où on a voulu se mettre. On va ressortir de ces législatives complètement laminés».

Il fallait que le PS parte seul à la bataille des législatives ?
«On meurt debout. Tant qu’on est débout il y a de l’espoir. Là c’est à genoux que le PS se trouve, inféodé au parti de Jean-Luc Mélenchon. Devant cette situation, je prône la non soumission !»

Comment cela est-il possible ?
«La logique aurait voulu que le dialogue se fasse avec EELV, PC, PRG, pour sortir une sorte de rassemblement. C’était parfaitement possible, mais la direction du PS ne l’a pas souhaité».

«Ce qui est dramatique c’est de se mettre à genoux devant un leader populiste»

Quels sont, pour vous, les sujets de divergence avec La France Insoumise ? L’Europe ?
«Je ne pense pas qu’à l’Europe, car il n’y a pas que l’Europe. Jamais le Parti Socialiste n’avait pacté avec un parti populiste. Or, je l’affirme, La France Insoumise de Jean-Luc Mélenchon est un parti populiste. Ce qui est dramatique c’est de se mettre à genoux devant un leader populiste. C’est tout ce que l’on a combattu depuis des décennies. C’est balayé d’un revers de main, au nom d’un marché de dupes.
Je rappelle qu’avant la Présidentielle, le 1er secrétaire Olivier Faure disait, je cite que «tout accord avec LFI est un accord de nuls». Et puis quelques jours après la Présidentielle on se précipité pour chercher un accord de nuls, un marché de dupes. Pour une fois Olivier Faure avait raison.
Cela, ce n’est pas l’histoire du PS. Discuter avec d’autres oui, mais il faut un socle commun. Quel est le socle commun ?
On n’est pas d’accord sur l’Europe, sur les institutions, sur la gestion de crise en Ukraine, sur la laïcité, sur la fameuse 6ème république qui est une absurdité… Par d’accord sur le nucléaire évidemment. Le PS ne veut pas en sortir alors que LFI veut en sortir.
Ce n’est pas une question d’ego pour se rassembler. C’est une question de fond».

Laquelle ?
«Dans le paysage politique français, plus personne ne va incarner la social-démocratie. Le PS est un parti social-démocrate. La France Insoumise, représente l’extrême propulisme. Les Républicains est un parti libéral, voir ultra libéral. LREM libéral et un peu social-libéral. Qui pour incarner la social-démocratie. Je ne comprends pas que l’on a démissionné, laisser cette conviction, nos convictions»…

«Oui je suis très en colère... Là c’est le renoncement total du PS»

Bernard Cazeneuve a démissionné. Envisagez-vous de faire de même ?
«Je m’interroge beaucoup. Je n’écarte pas l’idée de quitter le Parti Socialiste ! J’essaye de prendre du recul. Je veux prends le temps de la réflexion. Je vais voir comment les choses peuvent s’organiser. Je vais voir comment les personnes qui ont voté contre l’accord avec La France Insoumise, à près de 40%, vont s’organiser. J’espère une consultation des militants. Si ce n’est pas le cas, je ne pourrai pas rester au PS. Je resterai socialiste, mais plus au PS. Je prends le temps de la réflexion… Si la tendance reste la même, si d’autres personnes souhaitent mettre en place une formation incarnant la social-démocratie j’en serai. Jean Jaurès prônait de rechercher un idéal et tenir compte des réalités.
On sait ce que sont les réalités. Il faut se remettre en question. Imaginer la politique au plus près des citoyens. Avec le citoyen et pour le citoyen. Pour plus de justice sociale, plus d’humanité, plus d’égalité. En tenant compte des réalités»

On vous sent très en colère…
«Je suis très en colère. Je ne l’ai jamais été autant vis-à-vis de mon parti. J’ai longtemps fait partie des courants minoritaires, comme au dernier congrès. Là c’est autre chose. Là c’est le renoncement total du PS, de ce qu’il a été pendant des décennies. C’est une insulte et une offense à ceux qui ont dirigé le PS depuis Jaurès. C’est très douloureux».

On voit bien que le pays est à la recomposition politique. Vous la voyez comment ?
«En toute sincérité, j’ai toujours pris mes responsabilités. J’ai toujours dit que je voterai contre l’extrême droite. Est-ce que je peux me retrouver, comme certains socialistes, à rejoindre le parti présidentiel ? Très honnêtement non. Même si je n’ai jamais été dans une opposition frontale, je dis non. Je n’y retrouve pas la social-démocratie. Plutôt une politique libérale, ou plus libérée. A laquelle je ne souscris pas».

«Il y a la place pour un parti social-démocrate»

Voyez-vous un espace entre la majorité présidentielle et la gauche de Mélenchon et de la France Insoumise ?
«Je pense qu’il y a un espace. Je ne pense pas que l’on peut avoir un seul socle contre l’extrême droite. Le ni droite ni gauche, a contribué à renforcer l’extrême droite. Quand on ne dit pas que l’on est de droite ou de gauche, les gens vont vers les extrêmes.
Il y a la place pour un parti social-démocrate. Soit le PS est capable de se refonder. Soit il faudra refonder avec d’autres».

Carole Delga, présidente de l’Occitanie est très dure aussi avec Olivier Faure. Elle répond à ce que vous attendez ?
«Elle peut l’incarner comme d’autres. Elle fait partie de cette génération, de ma génération, avec d’autres élus qui peuvent l’incarner ; Le Maire de Montpellier, et d’autres, qui sont beaucoup plus nombreux qu’on ne le pense…»

Vous souhaitez les retrouver, vous retrouver rapidement ?
«J’attends les législatives et leurs résultats. Je pense qu’après la directions sera tellement ravagée qu’il faudra bien partir sur autre chose. C’est à ce moment là qu’il faudra rebondir. Je suis prêt à travailler».

«Je ne ferai pas campagne pour la candidate ou le candidat sous l’étiquette union populaire»

Souhaitez-vous des candidatures dissidentes ?
«J’ai toujours dit que Le Creusot est une place forte tenue par le PS avec une majorité élargie. Je ne le renie pas et le Maire est socialiste. J’ai toujours dit qu’il y avait légitimité qu’un socialiste ou une socialiste, ça n’engage que moi, soit candidate ou candidat. On était en mesure de le faire. L’accord passé entre le PS national et La France Insoumise, fait qu’on n’en n’a pas la possibilité. Il y a un accord. Je ne veux pas ajouter la confusion à la confusion. Je ne prône pas pour une candidature dissidente. Mais je suis très clair : Je ne ferai pas campagne. Je ne ferai pas campagne pour La France Insoumise. Je ne ferai pas campagne pour la candidate ou le candidat sous l’étiquette union populaire».

Le prochain scrutin sera les Européenne ? Ce sera un virage ?
«Il s’agira d’une élection politiquement stratégique. Que va faire la direction du PS si elle reste la même ? On va se ranger derrière LFI ou on va y aller seuls ? Et les municipales ? LFI va demander sa part du gâteau et imposer ce qu’elle veut. Idem pour les Sénatoriales. Il y aura un effet domino. Ceux qui ont signé l’accord sont les responsables de cette situation impensable et incroyable».
Recueilli par 
Alain BOLLERY