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06/09/2024 03:18
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David Marti : «Emmanuel Macron, au final, souhaitait quelqu'un de droite et c’est Michel Barnier. Il aura énormément de mal à tenir»

Dans une longue interview, le Maire du Creusot et Président de la Communauté Urbaine réagit à la nomination de Michel Barnier à Matignon, mais aussi à la crise politique. Il affirme que Bernard Cazeneuve était le plus placé pour faire nation. Bernard Cazeneuve dont il est proche et à qui il aurait sans aucun doute dit «oui» pour participer à un Gouvernement.
Comment vous réagissez à la nomination de Michel Barnier, alors que d'autres noms ont été évoqués, dont celui de Bernard Cazeneuve, dont vous êtes très proche ?
DAVID MARTI : «Oh, ma réaction, elle est assez simple… Emmanuel Macron
ne savait pas trop comment se sortir de l'impasse dans laquelle il s'était mis lui-même, suite au deuxième tour des législatives !
Il faut dire qu'on a vécu depuis 50 jours des choses assez ubuesques, en proposant parfois des noms, en essayant de sonder l'opinion, en essayant de sonder les partis politiques, et on voit bien que tout ça tournait en rond et ça devenait, je dirais, ridicule.
Il y a des noms crédibles qui sont sortis. Effectivement. Bernard Cazeneuve, en ce qui me concerne, est quelqu'un qui avait le maximum de chances, en tout cas par rapport à d'autres candidats qui ont été nommés, de pouvoir apaiser, rassembler au maximum.
Et pouvoir proposer un gouvernement et un programme dans le cadre d'une cohabitation, parce qu'il s'agit bien une cohabitation.
Bernard Cazeneuve l'a dit lui-même, il s'agira d'une cohabitation si je suis premier ministre, pour mener une politique différemment.
Aujourd'hui on le voit bien et c'est le sens aussi de tout le travail que je mène avec Bernard Cazeneuve… On ne peut pas diriger le pays comme on le faisait avant. Il faut d'autres méthodes et d'autres pratiques.
Et Bernard Cazeneuve, lui, est une personnalité qui à la fois a de l'expérience, car il a occupé des postes importants de Ministre, mais aussi de Premier ministre, quelqu'un qui est respecté par beaucoup, au-delà même de ses propres convictions politiques. Moi j'ai l'occasion d'échanger avec beaucoup d'acteurs économiques ou de sociétés qui reconnaissent toutes les qualités de Bernard Cazeneuve, même s'il ne partage pas les idées. Donc quelqu'un qui a une crédibilité y compris au niveau de l'opinion publique. Donc pour moi la candidature de Bernard Cazeneuve elle me paraissait être la meilleure».

«Il y a une anomalie»

 
Oui mais ce n’est pas lui que le Président de la République a désigné…
«C'est un autre choix qui a été fait, et il ne me surprend qu'à moitié puisque Emmanuel Macron au final ce qu'il souhaitait c'était quelqu'un de droite mais LR, puisque Michel Barnier est LR.
Michel Barnier a un parcours de politique tout à fait respectable. Il a occupé des postes également importants de ministre mais aussi de commissaire européen ; donc un homme qui a de l'expérience politique. Un homme qui est plutôt respecté, donc là-dessus il n'y a rien à contester, mais sur le plan politique, c'est un homme de droite, LR.  Je rappelle que LR est la quatrième force politique à l'Assemblée.
Donc il y a quand même une anomalie parce que Emmanuel Macron nomme une personnalité qui représente la quatrième force à l'Assemblée !»
 
Comment voyez-vous la période qui s’ouvre ?
«Je pense d'abord que Michel Barnier aura énormément de mal à tenir, mais pour d'autres ça aurait été aussi difficile. La vérité c'est que nous allons avoir, on verra le discours de politique générale qu’il tiendra, mais connaissant son parcours et l'homme, on aura une politique d'austérité, une politique conservatrice, puisque c'est un conservateur, pour ne pas dire un ultra-conservateur… De droite, et je dirais que la longévité de ce gouvernement va dépendre, et c'est là aussi qu'il faut s'interroger, d'une formation politique qui est le Rassemblement National.
C'est le Rassemblement National qui va décider si M. Barnier continue avec son gouvernement ou pas. C'est ça la situation et je ne crois pas que pour le pays ce soit la meilleure solution !»
 
Que fallait-il faire ?
«Je ne dis pas qu'il y avait une solution idéale, c'est très complexe ; mais en tout cas
cette nomination ne correspond en rien à ce que les français ont envoyé comme message à Emmanuel Macron… Puisqu'il met à la tête du gouvernement encore une fois la quatrième force politique à l'Assemblée Nationale. Il y a donc quelque part aussi dans cette nomination un déni de démocratie voilà ce que je peux dire».

«C'est surtout au Président de la République que j'en veux»

 
Comment avez-vous apprécié le positionnement de La France Insoumise ?
«Maintenant il faut dépasser tout ça je crois. Moi j'en veux surtout au Président de la République d'avoir mis la France dans cette situation, au lendemain des européennes, en déclarant la dissolution.
C'est d'abord lui Emmanuel Macron le premier responsable. Ce n'était pas de nature à apaiser les français, à faire nation.
Il y avait déjà des crispations politiques fortes. Mais la dissolution, ce n'était vraiment pas le moment, et je crois que tout le monde aujourd'hui, tout le monde, y compris dans son propre camp, à de rares exceptions, dénonce cette dissolution qui n'avait pas lieu d'être dans la situation du pays. Et politiquement rien ne le justifiait.
Les européennes, ce n'est pas ça qui peut justifier une dissolution. Une dissolution aurait pu être justifiée par une motion de censure, par un pays qui ne pouvait plus être gouverné.
Ce n'était pas le cas. Même si on était en désaccord avec la politique gouvernementale, il y avait un gouvernement et la France était gouvernée. Avec des mesures qui ont été contestées, certes. Il y avait des tensions dans le pays, mais ça ne justifiait pas, après les européennes en tout cas, une dissolution. Donc c'est surtout au Président de la République que j'en veux, et je ne décolère pas d'ailleurs, d'avoir mis le pays dans cette situation !»

Est-ce que vous avez participé à l'université d'été du Parti Socialiste à Blois ?
«Non, non... Non, je n'y ai pas participé, mais je rappellerai que je n'ai jamais participé aux universités d'été du Parti Socialiste. Donc ce n'est pas nouveau. La seule chose que j'ai fait, c'est participer l'année dernière, non pas aux universités d'été du PS,
mais aux universités de la FNESER, puisque ça se tenait en même temps. Et j'étais intervenant…»
 
Et la ligne d'Olivier Faure, vous approuvez ?
«La ligne d'Olivier Faure, elle reste la ligne majoritaire… En nombre très juste, c'est limite, mais il est majoritaire, il est premier secrétaire.
Donc la ligne d'Olivier Faure reste ce qu'il a dit, donc dans un accord le plus large possible, à gauche…»

«J'ai toujours espoir que la ligne du PS change»

 
 Vous aviez menacé à un moment de quitter le PS. Vous y pensez toujours ?
«Non, pour l'instant, je ne suis pas dans cet état d'esprit, parce que j'ai toujours espoir que la ligne actuelle du PS change.
Près de la moitié des adhérents du Parti Socialiste sont plutôt sur un changement par rapport à la ligne d'Olivier Faure. Bon, on n'est pas majoritaire mais on est près de la moitié».
 
Comment ça peut venir ?
«C'est toujours après un congrès. Il faut faire un travail jusqu'au congrès. Ceux qui sont au conseil national, ce n'est pas mon cas, doivent aussi faire un certain travail pour que, à un moment donné, ce soit ce courant-là, c'est-à-dire le courant le plus progressiste du Parti Socialiste, devienne majoritaire. Il est incarné par des personnalités fortes d'ailleurs.
Je pense au maire de Montpellier, je pense à Carole Delga, je pense à
des personnalités comme ça qui sont dans les instances du Parti Socialiste et qui portent une autre voie. La voie sans doute qu'il faut suivre, comme moi je porte cette voie-là au sein du Parti Socialiste».
 
Un Député Rassemblement National a été élu sur la 3ème circonscription. Allez-vous l’inviter ?
« Il y a démocratiquement deux élus Rassemblement National sur la communauté urbaine, sur la troisième et sur la cinquième. Ils ont été élus démocratiquement et moi je suis quelqu'un qui respecte la démocratie, qui ai toujours respecté les codes républicains.
Moi je vis ça ni mal ni bien, c'est un constat. On verra d'abord comment les députés eux-mêmes se comportent au niveau du territoire et en fonction, je verrai quelle attitude adopter.
En ce qui concerne les invitations, le député sera invité dans les cérémonies où officiellement il doit être invité. Toute cérémonie qui n'est pas nationale officielle, il n'y a Mais c'était déjà vrai pour tous les parlementaires. Je veux dire, auparavant, il y avait des maires qui n'invitaient pas tel député, tel parlementaire. C'est au libre choix de l'organisateur.
Donc je verrai en fonction des événements, mais tout ce qui est commémorations, par exemple, qui relèvent du national, du code républicain, bien entendu que le député sera invité».

«On risque de vivre une crise politique encore plus importante»


Après les législatives vous aviez fait part de votre inquiétude. Elle est toujours là ?
«Comme je l'ai dit, je pense qu'on rentre dans un cycle, au moins jusqu'aux prochaines législatives, où le gouvernement aura énormément de mal à tenir. Donc on risque de vivre une crise politique encore plus importante.
Aujourd'hui, c'est Michel Barnier qui est Premier ministre. Je ne suis pas sûr que dans un mois, ce soit encore lui.
Et le risque de cette instabilité fait peser aussi le risque que le pays, dans son activité globale, soit au ralenti, à la fois sur le plan international et à la fois sur le plan national. Quand il y a des crises, quelles qu'elles soient, y compris une crise politique, ce sont les élus territoriaux qui, une fois de plus, vont être en première ligne pour maintenir une cohésion nationale au travers des politiques que nous portons.
J’espère qu'il ne se produise pas ce que j'ai pu entendre de la part de l'ancien Ministre de l'économie. Il a d'abord été sept ans ministre de l'économie. Et il fait peser la responsabilité des déficits nationaux en partie sur les collectivités.
De nombreuses associations d'élus ont déjà réagi. Moi je tiens aussi à réagir. Ce n'est pas acceptable. C'est un déni de réalité et ce n'est pas prendre ses responsabilités.
Le déficit il est là parce qu'il y a eu des décisions qui ont été prises. Il faut savoir assumer ses décisions.
Moi je préfère un Ministre de l'économie qui dit j'ai été obligé de prendre des décisions pour maintenir le pays à flot dans des périodes de crise graves, Covid, crise énergétique, et c'est tout à son honneur, plutôt que de se défendre de ses déficits en accusant les petits camarades de trop dépenser.
C'est l'État qui a trop dépensé. Il y avait sans doute des raisons, mais dans ces cas là on les assume !
Et moi je n'ai jamais critiqué le gouvernement quand il a mené la politique du «quoi qu'il en coûte», parce qu'il y avait des mesures fortes à prendre.
Par contre, je n'accepte pas que l'on dise qu'il faut réduire les déficits et qu'une partie de ces déficits vont être réduits encore grâce aux collectivités».
 
Il y a danger ?
«Le service public, il est important, nous devons le maintenir à minima comme il est aujourd'hui, voire même le développer. On se bat tous les jours dans les territoires, les villes, les communes, les intercommunalités, les départements, les régions, pour maintenir ce service public qui est la base, le socle de la cohésion nationale ! Surtout quand le pays va mal au niveau politique et qu'on vient nous expliquer maintenant qu'il va falloir réduire les dépenses. Ce n'est pas acceptable. Voilà.
Encore une fois, je crains que Michel Barnier applique une politique d'austérité qui touche les collectivités Et je le dénoncerai avec force, bien entendu».
Recueilli par Alain BOLLERY


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